MERCEDES-BENZ    

Dernière mise à jour : 20/05/2010

Reconstruction...

Petit historique, suite...

Après la Seconde Guerre, l'Allemagne est en ruine et Berlin est une ville détruite qui a souffert des bombardements. Après le départ des américains et des soviétiques, les jeeps et autres véhicules militaires ont désertés les rues, et les industries automobiles allemandes sont en reconstruction. En 1947, Mercedes reprend ses activités avec la fabrication du modèle d'avant-guerre le plus prisé, la Mercedes 170V.

En trois ou quatre années, le paysage automobile mondial change radicalement et cette mutation est encore accélérée par la crise. Chez Mercedes-Benz, la mutation n'est pas spectaculaire, mais révolutionnaire. Depuis 1902, l'image de Mercedes est scrupuleusement entretenue par une succession de types prestigieux, souvent à l'avant-garde de la technique, toujours réputés pour leur extrême qualité d'exécution, leur robustesse et leur fiabilité de fonctionnement. Dans la seconde moitié des années vingt, sous la férule technique de Ferdinand Porsche, le consortium Daimler-Benz produit des types de tourisme très classiques et une lignée fameuse de types sport, les S, SS et SSK, qui symboliseront à jamais la compétence technique du constructeur de Stuttgart. Performantes aux mains de sui sait les maîtriser, mais coûteuses et assez peu diffusées, ces Mercedes sport devenues légendaires sont des cartes de visite pour la firme, qui ne gagne pas d'argent avec elles. La situation économique de l'Allemagne se détériore rapidement en 1928 et 1929, après la période de reprise qui a suivi la réorganisation monétaire de 1923. Le chômage galopant, les faillites, le resserrement du crédit, la chute de la consommation ruinent les espoirs de l'Allemagne de revenir dans le concert des nations. La production automobile, baromètre de l'activité, traduit bien la conjoncture du moment : 110.000 voitures en 1928, 100.000 en 1929, moins de 80.000 en 1930. Chez Daimler-Benz, cette chute est anticipé dès 1928, quand la direction entre en conflit avec Ferdinand Porsche, dont les projets trop ambitieux face à un marché en déprime sont refusés. Porsche quitte la firme et ouvre son propre bureau d'études. Il est remplacé au poste d'ingénieur-en-chef par Hans Nibel, ancien directeur des projets de Benz et adjoint de Porsche depuis la fusion Daimler-benz de 1926. Un changement de philosophie radical se produit alors, qui bouleverse l'image de la marque : Mercedes va produire des voitures plus "populaires", d'une technique avancée en ce qui concerne les châssis, mais mécaniquement faciles à construire et à entretenir, car destinées à une clientèle aux moyens plus limités.
170
En 1931, la présentation de la 170 concrétise le virage à 180° de Daimler-Benz, qui relève du pari tant cette voiture rompt avec les productions précédentes. Si le châssis conserve des longerons en tôle emboutie, ceux-ci sont caissonnés et fortement entretoisés pour obtenir une rigidité extrême, qualité indispensable à l'efficacité de la suspension à quatre roues indépendantes. Mercedes et Nibel n'ont pas lésiné : plus d'essieux, mais deux ressorts transversaux à l'avant et des demi-arbres oscillants à l'arrière, suspendus par quatre ressorts hélicoïdaux, le tout complété par de puissants amortisseurs hydrauliques, placés transversalement à l'avant. Contrôlant les oscillations des roues avant, ils servent aussi de bras de guidage et d'éléments de sécurité en cas de bris d'un ressort. Du fait de l'absence d'essieux rigides, le châssis est d'ailleurs très surbaissé et l'arbre de transmission passe au-dessus des traverses. Les masses non suspendues sont réduites à leur plus simple expression et les organes mécaniques les plus lourds sont bien contenus dans l'empattement. Une double direction précise et un niveau de confort exceptionnel à l'époque donnent une conduite agréable. En 1931, les roues avant indépendantes apparaissent timidement sur le marché et, pour le commun des automobilistes, les quatre roues indépendantes relèvent encore de la technique-fiction.

Ce châssis d'avant-garde n'est pourtant pas exempt de défauts. La géométrie des suspensions est la cause de variations de voie et de carrossage ainsi que d'un roulis qui peuvent réserver quelques surprises. Heureusement, le souple et silencieux 6 cylindres de 1,7 litre seulement interdit toute prétention à la conduite sportive. Les freins sont à commande hydraulique, donc bien équilibrés. La boîte est à quatre rapports, dont le 4e, surmultiplié, améliore la consommation. Souplesse, silence et confort doivent séduire une clientèle habituée jusque-là à des sortes de camions luxueux que ce châssis moderne va vite faire vieillir. En quelques brèves années, le comportement routier des automobiles va radicalement changer et Mercedes y contribue généreusement avec ce nouveau type de châssis, qui va recevoir des moteurs de plus en plus puissants.

       

La 170 V, évolution de la 170, a fait ses preuves. Fiable et robuste, pratique et d'un prix accessible, elle est également baptisée "fourmi noire". Elle sera utilisée comme Taxi et tentera, difficilement parfois, de se trouver un chemin dans les ruines de la capitale allemande. Si la 170 V en version berline uniquement est proposée dès la reprise des activités de l'usine, la 170 D (Diesel) apparaît en mai 1949. Suivront ensuite les Va et Da, en mai 1950. On note aussi l'apparition, par la suite des versions S et OTP, cette dernière étant destinée à la police allemande. Elles disposent d'une capote et d'un pare-brise rabattable. Les dernières versions seront les Vb de Db, avant que pointe la succession, la 180.

Type 170 V Limousine 1949 et Type 171 V "Taxibal" 1952 Taxi de Berlin
Ixo

Une 200 (2 litres) succéda à la 170, puis une 230 (2,3 litre), une 290 (2,9 litres) et finalement une 320 (3,2 litres) en 1939, toutes à soupapes latérales et habillées de carrosseries de haute qualité. La suspension arrière indépendante à essieu brisé et ressorts hélicoïdaux de Nibel fut employée jusqu'en 1960.

Course

Souveraine, pratiquement invincible dans les années trente, l'équipe Mercedes de l'après-guerre n'est plus qu'une carcasse vide.
Les usines ont été bombardée, totalement détruites, le matériel de course saisi ou détruit... En 1950, la marque renaît pourtant en présentant, au Salon de Francfort, la 220 et la 300. L'interdiction de participer à des compétitions sportives internationales est également levée, ce qui va permettre à Mercedes de renouer avec le sport automobile. Alfred Neubauer va être l'architecte de la nouvelle équipe qui va former le nouveau service course.
300 SL
Pour revenir à la compétition, Mercedes engage trois monoplaces W163 en Argentine en janvier 1951. Battues par la petite Ferrari deux litres de Gonzales, les Mercedes V12 suralimentées nées en 1939 sont bel et bien démodées. Au cours de l'été 1951, Neubauer lance donc le projet W 194, une voiture dérivée de la berline de série 300 S. La carrosserie est en aluminium plutôt classique, avec des lignes rondes mais fluides et une originalité, des portes "papillon". C'est en mars 1952 qu'elle est présentée, et pour affirmer sa filiation avec le modèle de série, est baptisée 300 SL, SL pour Super Leicht (Super Légère). Neubauer en profite pour présenter sa nouvelle équipe représentée par des pilotes de la grande époque, Rudi Caracciola et Hermann Lang, et quelques nouveaux, Karl Kling, Fritz Riess, Karl Klenk, Théo Helfrich ou Norbert Niedermayer. Pour l'équipe, les objectifs sont : Mille Miglia, Panaméricaine et 24 Heures du Mans.
La DS Mille pattes, ou PLR (Poids Lourds Rapide), est née en 1972, créée par les ingénieurs de Michelin pour tester les pneumatiques de poids lourds à grande vitesse.

300 SL Grand Prix de Berne 1952
Hongwell
Aux Mille Miglia, en mai, les Mercedes sont dans le coup en restant en contact avec les Ferrari. Au final, elles prennent les 2e et 4e places. Quinze jours plus tard, Mercedes engage quatre voitures à Berne, pour le grand Prix. Face à une faible opposition, la course tourne à la démonstration avec un triplé gagnant. Pourtant, ce succès est terni par l'accident de Rudi Caracciola qui, blessé grièvement, met un terme définitif à sa carrière, il a alors 51 ans. Ce qui bouleverse les plans de Mercedes pour son prochain rendez-vous, Le Mans.
Après le triplé du Grand Prix de Berne, l'équipe Mercedes arrive confiante au Mans où trois voitures sont engagées. Le seul soucis de Neubauer est les problèmes de freinage de la 300 SL. Un système d'aileron mécanique actionné par le pilote est installé mais s'avérera inefficace. Il sera retiré pour la course. Après l'abandon des Ferrari et des Cunningham, la déroute des Jaguar, les Mercedes doivent ensuite rattraper la Talbot de Levegh qui compte quatre tours d'avance à 1 heure de l'arrivée. La chance est du côté de l'écurie allemande lorsque la Talbot s'immobilise, victime d'une casse moteur.

300 SL Victorieuse aux 24 Heures du Mans 1952 - Lang/Riess
Ixo
Neubauer, comme les pilotes, ont joué sur la patience et la fiabilité des voitures. Il donne alors la consigne aux voitures en piste (celle de Kling et Klenk n'est plus en course depuis la neuvième heure) de se regrouper pour passer la ligne d'arriver côte à côte. A ce moment de la course, Lang et Riess sont en tête dans la Mercedes n° 21 au museau bleu, à un tour des seconds, Helfrich et Niedermayer, sur la Mercedes n° 20 au museau rouge grenat. Le museau de la Mercedes malheureuse était vert, pourtant couleur d'espérance.
Après avoir placé 4 voiture à carrosserie Spider dans les 4 premières places au Nürburgring, Mercedes part à la conquête de la Panaméricaine. Là encore, Mercedes démontre sa puissance et signe encore un beau doublé. Kling et Klenk s'impose devant Lang et Grupp. Seule déception, la voiture de Fitch et Geiger fut disqualifiée. Cette victoire permet à la marque allemande de se faire une intense publicité aux Etats-Unis et d'assurer le succès commercial de sa voiture de série. La 300 SL a rempli sa mission : prouver au monde que Mercedes est redevenu un grand constructeur mondial.

300 SL Panamericana 1952
Hongwell

La voiture de Karl Kling et Hans Klenk, à l'arrivée de la Carrera Panamericana 1952, à Mexico. On distingue les dégats provoqués par l'impact avec un vautour qui provoqua quelques blessures à Hans Klenk.
Deux ans après ses succès, Mercedes propose son modèle de série dérivé de la 300 SL de compétition. Toujours dans le but de garder la filiation, cette nouveauté garde cette appellation de 300 SL. Exposée pour la première fois à New York, elle diffère sensiblement de la version compétition de 1952. Ses formes sont un peu plus arrondies mais la silhouette de base est conservée, comme le sont les portes "papillon". Ces portes d'ailleurs, seront sujet à débats aux Etats-Unis et quelques protestations de la part des américaines seront à déplorer.

300 SL 1954
Solido
En effet, si les portes de ce type s'avère peu pratique pour la circulation en ville, pouvant heurter les voitures voisines à l'ouverture, elles obligent les femmes à montrer "trop de jambe" pour les franchir, ce que la morale de l'époque réprouve. Malgré tout cela, le succès est toutefois à la hauteur des espérances de la marque qui, en 1957, en proposera un modèle roadster (cabriolet).
300 SLR
Après la 300 SL, Mercedes fait évoluer son modèle en proposant la 300 SLR. De ce coupé sera décliné des versions compétitions, les W196S qui s'illustreront dans de nombreuses compétitions. Seuls les 24 Heures du Mans échapperont au palmarès de Mercedes qui, malheureusement nous rappelle l'incident dramatique de l'édition 1955, édition à laquelle Pierre Levegh trouva la mort dans un accident dramatique qui fit de nombreuses victimes parmi le public du Mans. Les plus grands pilotes ont eu le privilège de conduire cette voiture. On peut citer Juan Manuel Fangio, Stirling Moss, Peter Collins ou bien Karl Kling et Denis Jenkinson.

W196 Streamliner Grand Prix de France 1954 Juan-Manuel Fangio
Solido
La 300 SLR W196S, digne héritière des W194, remportera le Grand Prix de l'ACF à Reims en 1954, avec un Fangio qui fait cette année là ses débuts chez Mercedes et qui devance l'autre "flèche d'argent", celle de Kling. Fangio remportera également les GP d'Allemagne, d'Italie et de Suisse.

Transporteur
Dans les années cinquante, les luxueux motor-homes qui encombrent aujourd'hui les paddocks des circuits de Formule 1 n'existaient pas encore. Pourtant, un camion hors du commun, d'origine allemande, attirait tous les regards. On l'appelait le "transporteur".

Après la Seconde Guerre, Mercedes-Benz revient à la compétition dès 1953 avec la 300 SL. Le succès est presque instantané, la voiture remportant quatre des cinq courses dans lesquelles elle était engagée, dont un doublé aux 24 Heures du Mans et les Mille Miglia. La machine est en route. Chaque fois que le constructeur s'investit dans la compétition, il y vient pour gagner. Le retour en Grand prix, autrement dit la Formule 1, est programmé dans les deux ans à venir. Tandis que les monoplaces W196 sont élaborées avec tout le soin et la rigueur nécessaires au Rennabteilung (le département courses), on se penche sur le problème des camions-ateliers et des transporteurs. Alfred Neubauer, le directeur de course de Mercedes-Benz, décide, pour mettre toutes les chances de son côté, qu'il faut un transporteur rapide, très rapide, afin de pouvoir intervenir dans les meilleurs délais sur les voitures à l'usine même en cas de panne sérieuse ou d'accident. Il a, dit-on, déjà dessiné un camion très performant équipé d'un moteur 8 cylindres en ligne en 1924 pour la Daimler-Motoren-Gesellschaft. Il confie la construction de ce transporteur hors norme à Hägele, directeur du département prototype de Mercedes-Benz, pour transporter les W196. Comme cahier des charges, il lui dit tout simplement : "faites quelque chose de bien.", en ajoutant que le camion doit être très rapide, même chargé d'une voiture de course.

    

L'ingénieur Hennige choisit de baser le bolide sur le robuste châssis à croisillons de la 300 S, le coupé haut de gamme de la marque à l'époque, dont l'empattement dépasse légèrement les 3 m. Pour le moteur, on prend ce qu'il y a de plus puissant de disponible dans la gamme : le 6 cylindres 3 litres de la 300 SL à injection directe. Pour une meilleure fiabilité, la puissance a été réduite de 215 à 198 ch, alors que le couple de 235 Nm à 4.750 tr/mn trahit néanmoins son hérédité de compétition. Rudolf Ulenhaut, l'ingénieur chargé de la mise au point des voitures de compétition, donne son feu vert à ce cocktail de puissance. La suspension, elle aussi empruntée à la 300 S, fait appel à des doubles triangles à l'avant. La transmission est assurée par une boîte à 4 rapports entièrement synchronisés. En ce qui concerne les freins, on a recours à de gros tambours. Cependant, en vue des cols alpins à franchir à grande vitesse avec une charge sur le plateau, les techniciens mettent un frein à disque sur l'arbre de transmission.

Renntransporter 1954
Conrad
Pour le style, aucune consigne n'a vraisemblablement été donnée à Hägele, et aucun dessin ni aucun plan ne lui ont non plus été fournis. Rapide veut dire efficace, et pour être efficace, le camion doit être aérodynamique, c'est-à-dire habillé au plus près de sa fonction. La surface frontale est donc réduite au minimum. La cabine dépasse tout juste la hauteur de la voiture chargée sue la plateau à l'arrière. Cela a été facile puisqu'elle est en porte à faux devant l'essieu avant, un bâti ayant été ajouté devant le châssis à double croisillon pour la supporter. La longueur totale de l'engin est de 6,75 m. La longueur des porte-à-faux avant et arrière additionnés est donc supérieure à celle de l'empattement. Une parfaite hérésie en terme de design. A la manière de la Citroën 3 CV ou de la Ford Anglia, l'arrière de la cabine adopte une lunette inversée, sous laquelle peut s'avancer le museau de la voiture transportée. En ce qui concerne l'intérieur du camion prévu pour deux personnes, on a simplement fait appel à la berline 180. En fait, on a aussi pris la partie centrale de la carrosserie de la berline, que l'on a élargie, ainsi que les portes et le bout des ailes avant avec les phares protubérants entre lesquels on a installé une calandre de 300 SL.
Le transporteur rendit quelques services pendant les saisons 1954 et 1955, mais fut surtout une vedette presque aussi admirée que les W196 dans les paddocks. Bien que le musée Ford de Dearborn ait manifesté son intérêt, le transporteur resta chez Mercedes et fut "cafuté" ("détruit" dans le jargon des techniciens) en 1967. C'est en 1994 que l'idée de reconstruire le transporteur fit surface. Elle fut confiée à l'atelier Mika (mirbach et Kampschulte) de Mölln, dans le nord de l'Allemagne. Sept ans et 6.000 h de main d'oeuvre plus tard, le transporteur a pu reprendre du service. La répliqe fut exposée lors du Rétromobile 2001, chargée d'une monoplace W196 non carénée.