TATRA    

Dernière mise à jour : 26/05/2010

Star de l'Est...

Petit historique

En 1850, Ignac Schustala (Sustala) fonde sa première entreprise, une fabrique de voitures à cheval. En 1853, il s'associe à Adolf Raska, donnant naissance, à Kovprivnice, localité de Moravie, à la société Ignaz Schustala and Co, qui deviendra ensuite Tatra Works. Des voitures à cheval, en passant par la fabrication de chariots et de wagons de chemin de fer, la firme abordera l'automobile en 1898.

Ignac Schustala (1822/1891)

Contexte

La grande guerre a changé les mentalités et le regard de la société sur l'automobile. Celle-ci a pris une part importante au conflit en bénéficiant de progrès techniques suscités par les besoins des belligérants. Ford n'est plus le seul champion de la "voiture pour tous".
En Europe centrale, le niveau de vie moyen maintient le concept de voiture populaire au rang d'utopie, mais les nouvelles méthodes industrielles permettent à quelques esprits modernes d'y songer sérieusement. Parmi ceux-ci, Hans Ledwinka, ingénieur autrichien formé à l'école ferroviaire de la société Nesselsdorfer venue à l'automobile en 1897, pour laquelle il a étudié dès 1906 de puissants modèles perfectionnés juste avant le conflit.

Première Tatra

C'est en 1898 que la première automobile NW voit le jour, la NW Prâsident. C'est grâce à l'achat d'un exemplaire d'un véhicule Benz que la marque passa à l'automobile. Schustala, décédé en 1891, a été remplacé par Hugo Fischer von Rölerstamm. A la tête de la société qui devient alors la Nesselsdorfer Wagenbau-Fabriks-Gessellschaft, il remarque la petite automobile de Benz pilotée par un certain Theodor von Liebig. Très vite, il fait venir une de ces voitures et la confie à deux de ses ingénieurs, Sage et Rumpler. Edmund Rumpler, avionneur à son heure, et futur concepteur d'automobiles pour son compte, va travailler à à la conception des premières automobiles NW, aidé pour cela par un petit nouveau du nom de Ledwinka. En plaçant le moteur Benz sur un châssis nouveau de conception maison, ils donnent naissance à la NW "Prâsident".

     

La Prâsident reliera Nesseldorf à Vienne, 328 km, en 14 heures 30 minutes.
En 1899, NW sortira un nouveau modèle, la "Météore", une voiture dotée d'un bicylindre de 6 chevaux. Les modèles suivants auront leurs propres moteurs. En 900, la première voiture de Hans Ledwinka sera une bicylindre à trois soupapes par cylindre de 2.750 cm3. Viendront ensuite, en 1904, les Types D 24 CV et E 18 CV.

Changement de nationalité

Pendant la Première Guerre mondiale, l'entreprise travaille avec l'armée austro-hongroise alliée des Allemands. Après la défaite de 1918, la Moravie devient, avec la Bohème et la Slovaquie, la Tchécoslovaquie. L'avenir de l'entreprise va être bousculé.

Hans Ledwinka (1878/1967)

Né à Klosterneuburg, près de Vienne en Autriche, Hans Ledwinka entre à 19 ans au service de la société Nesseldorferwagenbaufabrikgesellshaft, future Tatra (1919). Il quittera une première fois cette entreprise entre 1902 et 1905 pour rejoindre une fabrique de véhcules à vapeur, Friedman, puis en 1916 après un désaccord avec le directeur de la firme, Erhard Köbel. Il travaillera alors pour Steyr, entre 1916 et 1921, une autre grande firme autrichienne spécialisée dans les productions de guerre. Il revient en 1921 à la Nesseldorfer. Entre-temps, suite aux conséquences des traités de 1919, la firme est devenue tchécoslovaque et adopte la raison sociale de Tatra. La ville de Nesselsdorf devient, dans le même temsp, Koprivice. C'est principalement avec Tatra que Hans Ledwinka se fera un nom dans l'industrie automobile, certains le considérant comme le meilleur des techniciens européens. La firme a alors un nouveau directeur, Leopold Pesching. Ce dernier nommera Ledwinka responsable du bureau technique de la branche automobile, avec la heute main sur les études et la fabrication. Il poursuit alors la construction des types T et U de 1914, en très petits volumes, mais la firme Tatra fusionne en 1923 avec la Righoffer de Prague, productrice de matériel ferroviaire. Libre de ses décisions tant que son actionnaire principal est satisfait des résultats. Ledwinka achève l'étude d'une petite voiture très innovante, qu'il a proposée à Steyr avant d'emporter ses plans chez Nesselsdorfer/Tatra. Les ayant établis chez lui et à l'hôpital après un accident de la route, il est libre d'en disposer.
Tatra 11

Voiture d'ingénieur, celle qui va devenir la Tatra 11 est en fait autant pensée en fonction des difficiles conditions routières de l'Europe centrale que de ses futurs utilisateurs. Climat, état et profil des routes et pouvoir d'achat limité interdissent d'imaginer un marché de masse et des voitures d'utilisation coûteuse. Pourtant, Ledwinka va intégrer tous ces paramètres pour définir une automobile à la fois simple et raffinée. Il y réunit un ensemble de solutions dont il ne revendiquera jamais la paternité, mais seulement leur amalgame sur une auto "abordable" : châssis réduit à courte poutre centrale en tube d'acier à haute résistance pour la robustesse et la rigidité ; moteur avant à 2 cylindres opposés à plat refroidis par air, pour résister aux conséquences des hivers rigoureux ; enfin, roues indépendantes par demi-essieux oscillants, pour le confort, en raison de l'état déplorable de la plupart des routes. En 1923, Tatra est la première marque à adopter ce principe sur une voiture de série. Le châssis est défini par Ledwinka, mais le moteur de 1.056 cm3 donnant 12, puis 14 ch, est dû à l'un de ses assistants, l'ingénieur tchèque Julius Mackerie, spécialiste du refroidissement par air. Ledwinka impose l'air forcé dans des chemises en tôle entourant les cylindres et soufflé par un volant moteur faisant fonction de ventilateur. Le groupe moteur-boîte-pont arrière forme un ensemble rigide : pas de flectors (trop fragiles), pas de cardans (trop coûteux). Un ingénieux système à deux pignons d'attaque, deux arbres concentriques et deux couronnes, permet de faire osciller dans le plan vertical transversal les demi-arbres moteurs sans joints universels. Un différentiel à pignons droits à étage, à l'entrée du pont, se charge de compenser les variations de vitesse angulaire. Les roues avant comme les roues arrière sont portées par des demi-essieux à fourche oscillants, et suspendues par un seul ressort à lames transversales par essieu.

      

Ledwinka prend alors le volant d'une des premières voitures à quatre places, et part en famille pour un voyage d'essai de près de 10.000 km en Autriche, Italie, Suisse et France. Peu à peu, la réputation de fiabilité et de robustesse de la T11 s'établit, et la voiture devient T 12 en 1926 avec des freins avant. Ce type dérivé est produit jusqu'en 1930. Les T11 et T12 produites à plus de 25.000 exemplaires, dont certaines rouleront encore dans les années soixante-dix, sont à l'origine d'une série de véhicules populaires qui ont acquis une certaine notoriété, à commencer par les Tatra à moteur avant à 4 cylindres produites de 1928 à 1947, la Volkswagen fortement inspirée par ces technologies et même la 2 CV de Citroën, sans aller jusqu'à la Chevrolet Corvair, voire à la Porsche. Mais justement, Ferdinand Porsche et Hans Ledwinka n'étaient-ils pas compatriotes, collègues et amis ?

Bien qu'accueillie avec méfiance, la Tatra 11 connaîtra un beau succès commercial mais également en compétition. La petite voiture dut prouver sa valeur en participant à des épreuves routières et de vitesse, bien que la firme se fût interdit jusque-là toute activité sportive. En 1924, le champion maison Joseph Vermirovsky remporta la classe 1.100 cm3 au Gp de la Solitude à Stuttgart, en Allemagne. L'année suivante, elles remportent également une des courses les plus en vue en URSS, le Leningrad-Moscou-Kharkov-Rostov-Tbilisi, une épreuve longue de 5.300 km, en s'imposant devant 73 autres concurrents. Ces types de course étaient spécialement préparés avec 3 soupapes par cylindre et une compression supérieure (27 chevaux). Les dérivés, Type 12, créèrent la surprise en disputant la Targa Florio, où elles prirent les deux premières places de la catégorie 1.100 cm3. La première place revient alors à Fritz Huckel, la seconde à Karl Sponer.

Tatra 11 Phaton 1925
Igra

De la T30 à la T97

Tatra T30

Tatra T57
Tatra T77
Après le grand succès de la Tatra 11, aussi bien commercial que sportif, puis les T30 de 1926, Tatra proposa les T 52, T 57 et T 75 en 1931. Hans Ledwinka va poursuivre ses études, dans un domaine plus pointu, l'aérodynamique. En 1933, il réalise une voiture très profilée, en forme de goutte qui d'ailleurs inspirera Porsche pour la création de sa Coccinnelle. Après cette réalisation, Ledwinka adopte ses principes sur une voiture de série renommée aujourd'hui, la Tatra T77.

Prototype Tatra V570 de 1933

       

Le protoytpe de la Tatra V570 et la Tatra T77
La T 77 de 1934 sera proposée avec un V 8 de 3 litres, un moteur développant 70 chevaux qui permet à la voiture d'atteindre les 160 km/h, une vitesse supérieure à la Renault Reinastella. Cette voiture va jouer un grand rôle dans l'histoire de l'automobile puisqu'elle est l'une des premières à l'Est à être construite selon les principes aérodynamique. Sa carrosserie enveloppante étonnante est montée sur un châssis type caisson central. La voiture suivante, la T 87, produite jusqu'en 1950 laissera sa place en 1936 à la T 97, dernière voiture d'avant-guerre. Sa production s'achève en 1939, après l'annexion de la Tchécoslovaquie par l'Allemagne. Ce véhicule affiche une ressemblance troublante avec la Coccinelle qui sortira deux ans plus tard, sur décision du pouvoir allemand, et oeuvre de Ferdinand Porsche. Volkswagen indemnisera Tatra en 1961 en lui versant 3 millions de Marks.

Tatra 77 1934
Ixo

Après-guerre

Emprisonné lors de l'entrée des troupes soviétiques en Tchécoslovaquie en 1945, Hans Ledwinka ne sera libéré qu'en 1951. Il a alors 73 ans. Il ira s'établir en Allemagne, à Munich, et s'éteindra dans cette ville en 1967.
Tatra 600 Tatraplan

       

En 1946, Tatra lance la T600 sur base de T97. Son moteur est un 4 cylindres de 50 CV de 2 litres de cylindrée. Proposée en berline 4 portes, ou en coupé 2 portes, elle portera aussi le nom de "Tatraplan". Ce nom ne vient pas de sa forme mais de la planification économique mise en place par le nouveau régime en place. Quelques Tatraplan seront destinées à l'Export, construites par la firme Skoda dès l'année 1951, et ce jusqu'en 1952. Depuis 1951, sur ordre du gouvernement, la firme dut se consacrer uniquement à la production de véhicules industriels. Cependant, les officiels Tchécoslovaques manquaient de voitures officielles et il fut décidé de produire à peu d'exemplaires des berlines de prestige capable de satisfaire la demande et de promouvoir le nouveau régime en place. Les premiers prototypes sortiront des ateliers entre 1954 et 1955. Les véhicules de préséries ne seront pas à la hauteur des espérances.
Tatra 603
En 1957 sort la T603, sous la tutelle de l'Union Soviétique. Cette Tatra 603 sera la vitrine de l'industrie de l'Est. Principalement affectée aux hauts dignitaires du parti, et aux agents de la Police politique, Tchèques ou autres, elle sera la voiture préférée de la Stasi, police secrète de l'Allemagne de l'Est.

Sure, rapide, la Tatra 603, construite au cours des années 60 et 70 en Tchécoslovaquie, fut au départ une voiture confortable destinée aux autorités gouvernementales comme voiture officielle. Produite à peu d'exemplaires, 20.000 en vingt ans, entre 1955 et 1975, la luxueuse 603 symbolisait le progrès de l'industrie automobile tchèque dans les pays du bloc soviétique qui l'adopteront également. A la fin des années 50, elle fait son apparition dans le service des taxis de Prague et c'est la nouvelle 613 de 1989 qui viendra doucement la remplacer dans les rues de la ville.

603 Taxi de Prague 1961
Ixo
C'est cette voiture que l'on retrouve dans le film "L'aveu", avec Yves Montant, dans un passage ou l'acteur est inquiété par la police secrète tchécoslovaque.

Chant du cygne

En 1963, Tatra proposera la T2 603, une version restylée et amélioré de la 603. Sa calandre est plus grande, avec quatre phares au lieu de trois, et les prises d'air sur le capot ont disparu. Quelques modifications seront encore apportées en 1969. Sa production s'acheva en 1975, après plus de 20.000 exemplaires. La remplaçante est déjà lancée, la T613, sur la même architecture que sa devancière, avec un V8 de 3,5 litres. Elle prendra une nouvelle dénomination en 1980, 613-2, après un léger restyling. Suivront les 613-3 et 613-4, avant de voir apparaître en 1993 l'injection électronique sur les modèles. Entre-temps, Tatra est devenue une société anonyme et Chrysler entre à 15 % du capital de l'entreprise. La gamme se compose alors de quatre modèles, la berline 613-3, la limousine 613-s, la berline découvrable 613-k et le cabriolet.

Prototype Tatra T700
La Tatra T700 est présentée et lancée en 1996. Malheureusement, les ventes sont en chute libre. La marque sera rachetée en 1999 par l'américain ASC. Dès lors; la production des automobiles sera stoppée et seuls les camions lourds seront construits, avec des moteur V8 et multiples transmission, 6x6, 6x8 ou 8x8.