TALBOT - TALBOT-LAGO    

Dernière mise à jour : 26/05/2010

Première anglo-française...

Petit historique

Contrairement à ce que certains pensent, les origines de la marque Talbot sont anglaises. En 1902, lord Shrewsbury and Talbot, aristocrate passionné par l'automobile, rencontre Adolphe Clément, le fondateur des Cycles Clément, puis des Automobiles Clément.

Charles Henry John Chetwynd-Talbot, Comte de Shrewsbury (1860/1921)

Adolphe Clement (1855/1928)

           

A cette époque, Adolphe Clément dispose de nombreuses usines, dont celle située au Quai de Javel et qui deviendra plus tard la propriété d'André Citroën. Clément propose, en France, les Clément-Gladiator et les Clément-Panhard, des voitures qui rencontrent un beau succès, principalement une voiturette 4 HP 1/2 de 1901. Conquis, lord Shrewsbury and Talbot achète la licence de fabrication des voiturettes Clément pour la Grande-Bretagne et fonde la société Clément-Talbot Ltd. Jusqu'en 1906, cette entreprise produira les mêmes voitures qu'en France. Dès 1907, la firme produira ses propres modèles sous le nom de Talbot. En France, Adolphe Clément à créé une nouvelle société, Clément-Bayard.

S.T.D

En 1919, la firme Darracq, constructeur de premier plan et fondateur en 1896 de la marque Gladiator, est l'un des plus ancien constructeur français. Darracq diffuse ses produits dans toute l'Europe et a vendu des licences en Allemagne (Opel), et fondé des filiales en Italie, la Societa Italiana Automobili Darracq (future Alfa) et en Grande-Bretagne, la A.Darracq and Co Ltd . En France, les usines sont situées à Suresnes, et tournent plein régime. Cependant, le créateur n'est plus aux commandes de l'entreprise, Darracq ayant démissionner en 1912. Alexandre Darracq, créateur des Gladiator, avait cependant démissionné depuis 1912 pour créer la marque Perfecta. La firme fut, à cette époque, rachetée par la filiale anglaise et c'est un anglais, Owen Clegg qui dirige l'entreprise. On note que la filiale anglaise est gérée, elle, par le français Louis Coatalen. En 1912, la firme se mit à produire des copies conformes de la Rover Twelve. En 1919, la firme française absorbe Clément-Talbot, qui vient de vendre son entreprise à André Citroën. La production confiée à Darracq quittent le quai de Javel pour Suresnes. Notez que les initiales gravées sur les murs à l'entrée des usines Citroën du Quai de Javel, "AC", ne sont pas celles d'André Citroën, mais bien celles d'Adolphe Clément. En 1920, un consortium voit le jour, réunissant trois firmes, Sunbeam, Talbot et Darracq. Dès lors, et ce jusqu'au début des années trente, les voitures de Suresnes prennent le nom de Talbot-Darracq, les anglaises Clément-Talbot conservant le seul nom de Talbot. Quant aux voitures exportées en Grande-Bretagne, elle prendront le nom de Darracq pour ne pas faire de l'ombre aux Talbot anglaises.

Talbot France

           

11-Six
Vers 1925, la vogue des petits cylindres, venant des Etats-Unis, atteint la France. Talbot, marque française de luxe privilégiant la souplesse et le silence, adopte cette formule por sa nouvelle 2 litres, programmée pour 1928, la 11-Six.
Façon de se démarquer davantage des 10 CV de série à 4 cylindres, le chois du moteur 6 cylindres donne plus de prestige à une voiture, qu'elle que soit sa cylindrée. La nouvelle 11 CV de Suresnes n'a pas la tâche facile, car elle doit remplacer les brillantes DB/DC/DD/DS10 et 12 CV 4 cylindres apparues à partir du Salon de Paris de 1921, alors que leur succès, entretenu par une sage évolution et quelques variantes sportives, ne semble pas menacé.
Dans le cadre du groupe franco-britannique Sunbeam-Talbot-Darracq, la direction générale des études techniques est revenue à Louis Coatalen, qui a envoyé en France en 1923 deux jeunes motoristes de grande valeur, Vincenzo Bertarione bien assisté de Walter Becchia. Cette équipe chevronnée, responsable par ailleurs de remarquables moteurs de course, a créé une famille de 4 cylindres à culbuteurs, qui, sous l'appellation de 10 CV, a connu un beau succès jusqu'en 1927, sous diverses formes. Au Salon de cette année-là, Talbot amorce un net virage en supprimant les 4 cylindres (sauf la plus performante) au profit des nouvelles 2 litres, chargées de constituer le nouveau bas de gamme de la marque. Bas de gamme relatif d'ailleurs, car la M 67 ou 11-Six se situe nettement au-dessus des 4 cylindres précédentes, avec un prix de 58.000 francs en conduite intérieure contre 43.000 pour la DD. Mais le contexte économique est bon, après la réorganisation financière de 1926, et les volumes de production se gonflent, Citroën en étant l'exemple le plus spectaculaire.

Talbot M 67 L carrossée à l'usine Talbot de Suresne
La 11-Six est donc une luxueuse 2 litres à tendance sportive, avec sa boîte à 4 rapports reprise de la DD. Son moteur à culbuteurs est à course relativement courte et tourne plus vite que les moteurs précédents. Son couple plus régulier favorise les accélérations. Usiné dans la masse, le vilebrequin à quatre paliers est complété d'un damper, ou amortisseur de vibrations. L'arbre à cames est entraîné par pignons hélicoïdaux, système à l'époque plus précis que la chaîne, bien que pus bruyant. Avec un seul carburateur, la puissance maximale d'utilisation se situe à 45 ch et la 11-Six atteint 105 km/h pas trop lourdement carrossée. Le châssis assez long est allégé par rapport aux types précédents, avec des ressorts arrière semi-elliptiques et non plus cantilevers, qui assurent la poussée et la réaction. Les ressorts avant sont courts, pour limiter les réactions sur la direction. Dès son apparition, la 11-Six connaît un bon succès et, sur 1928 et 1929, la production dépasse les 3.600 exemplaires, un volume satisfaisant pour une voiture de ce prix. Au Salon de 1929, elle est dédoublée par une version coure, la M 67 C, dont l'empattement est réduit à 313 cm, la M 67 L (Longue) étant construite sur un empattement de 323 cm. Ces types restent au catalogue jusqu'au Salon de 1932, où apparaît la ME 67 à roues avant indépendantes, sur 297 cm d'empattement.

Les qualités de la 11-Six sont attestées lors de ses participations répétées dans les grandes épreuves routières de l'époque (Paris-Nice, Rallye de Monte-Carlo, Paris-Vichy-Saint-Raphaël féminin) et dans les concours d'élégance, où le châssis long permet de présenter d'élégants cabriolets et conduites intérieures réalisés par l'usine, qui développe ses ateliers de carrosserie, ou des coupés de ville signés par les plus grands noms de la profession. Toutefois, la cylindrée de la 11-Six s'avère un peu juste pour briller en compétition, même avec le châssis court. Dès 1928, Talbot va développer une nouvelle famille de moteurs à sept paliers sur le châssis de la M 67 pour créer les séries 74 et 75, désignation qui traduit encore leur cote l'alésage. Mais la multiplication des héritières de la 11-Six va coûter cher à Talbot-Suresnes.

Vincenzo Bertarione et Walter Becchia

Vincenzo Bertarione débuta chez Fiat, où il dessina le moteur 2 litres de la Fiat 804 qui remporta le GP e l'ACF 1922. Passé chez Sunbeam en Angleterre, il recréa pratiquement le même moteur, qui gagna à Tours en 1923 et, à Suresnes, le nouveau 1500 Talbot à 4 cylindres, puis le 1500 8 cylindres en ligne de 1926. Bertarione finit sa carrière chez Hotchkiss, où, à partir de 1931, il dirigea les études Moteurs. Son assistant, Walter Becchia, resta chez Talbot-Suresnes, où il conçut la suspension avant indépendantes de 1932, avant de travailler avec Antony Lago en dessinant notamment la culasse hémisphérique des T 150 à arbre à cames latéral. Puis, entré chez Citroën, il dessina, entre autres études, le moteur de la 2 CV et la culasse hémisphérique du moteur de la DS 19.

Lucy Shell

La pilote de rallye franco-américaine (et future patronne de l'Ecurie Bleue, qui généra plus tard les Delahaye de compétition), Lucy Shell, se fit remarquer au volant d'une 11-Six dans le Rallye de Monte-Carlo 1929 en se classant 8e au général et en remportant la Coupe des Dames juste devant son coéquipier Pommier, également sur 11-Six. En 1930, Pommier finit 12e et Lucy Shell, 26e.
Pacific
La firme est florissante, et en 1930, trois mille ouvriers travaillent à Suresnes pour produire les Talbot françaises. Chères, les 4 et 6 Cylindres sont des grandes routières, construites avec soin, et possédant de grandes qualités, de fabrication, de rapidité, et de silence de fonctionnement. A cette époque, elles rivalisent avec les Delage, Hotchkiss et Delahaye.
C'est dans cette période d'euphorie que Talbot dévoile la "Pacific", une luxueuse berline dotée d'un moteur 8 cylindres. Malheureusement, la crise de 1929 s'étend sur le vieux continent et comme beaucoup de constructeurs, l'entreprise se retrouve en grande difficulté, au point que le consortium STD envisage de mettre la firme de Suresnes en liquidation. La marque ne devra son salut qu'à l'intervention d'un homme, Antony Lago.

Pacific 1932
Norev
Moins connue sous l'appellation H78, la Pacific vient se placer sur le marché des berlines de voyages, grandes routières. Les français, nantis, découvrent un nouveau mode de voyage, s'offrant de luxueuses voitures souvent très bien équipées, les voitures pouvant recevoir quelques équipements créés spécifiquement par des artistes renommés, comme par exemple les malles de voyage Hermès et Vuitton. Dès 1920, le désir de découvrir le monde est vif et grâce aux nouvelles routes qui voient le jour dans les pays développés, ce rêve devient réalité. En France, la Nationale 7 va devenir une route très fréquentée.

Talbot Lago

Anthony Lago

Vénitien, ancien major de l'armée de l'air italienne, Antony Lago est un ingénieur formé à l'école polytechnique de Milan. Au début des années 20, il s'installe à Londres pour assurer la représentation des automobiles Isotta-Fraschini. Juste avant la crise de 1929, il change de voie et devient directeur général de la Wilson Self-changing Gear Ltd, une société qui exploite les brevets de la boite présélective Wilson. Fournisseur de la Talbot Ltd, il a l'opportunité de devenir, en 1933, le sous directeur de la Sunbeam, sous le contrôle de la STD d'Owen Clegg. Son poste d'administrateur lui permet d'être présent le jour ou le groupe décide la liquidation de Talbot France. Seul à se prononcer pour sauver la filiale, il trouve un accord et devient de ce fait directeur général de la société française de Sursnes dès 1934. Une riche initiative car en 1935, STD est absorbée par Rootes. Talbot France est désormais totalement indépendante. A son arrivée, Lago réorganise l'entreprise, revoit les productions, licencie quelques cadres de l'entreprise. Seul patron, soutenu par de nouveaux financiers, il rassemble toutes les activités de la nouvelle SA Automobiles Talbot à Suresnes. A savoir que la Sté Talbot anglaise sera, en 1961, intégrée au groupe Rootes avec humber et Hillman, que Chrysler entra dans le groupe agrandi avec Singer, pour former Chrysler UK en 1970. Ce même Chrysler retrouvera la Talbot française en collaborant pour la conception des modèles 160/180.
Si Antony Lago conserve un temps l'ancienne gamme, y ajoutant de nouveaux châssis et un nouveau moteur 6 cylindres, c'est une nouvelle gamme qu'il présente au Salon de 1934. Ces nouveaux modèles, pour se différencier des anciens, porteront désormais une nouvelle dénomination rappelant leur puissance fiscale, sauf pour la T4 Minor.
T 23
La T23 est la première à bénéficier du renouveau voulu par Antony Lago. La nouvelle gamme adopte le nouveau 6 cylindres de 3 litres 17 CV, moteur monté sur la gamme T23 comprenant les Baby, Baby Sport, Major et Master. La T23 renouvelle la gamme Grand Tourisme de Talbot et le résultat est plutôt positif. Lors d'un concours d'élégance, en juin 1934 au Bois de Boulogne, les T23 apparaissent très britanniques et recueillent un certain succès. Il faut dire que Lago a fait appel à Figoni pour habiller les belles.
Dérivée de la Baby 3 litres, la baby 4 litres apparaît en 1937. La version la plus recommandable est le cabriolet qui dispose de quatre vraies places confortables aménagées malgré la ligne sportive. La voiture arbore des lignes fluides , élégantes et gracieuses, bien que la T23 reste très modeste dans la gamme. Le moteur 4 litres est celui développé par Becchia pour la T 150. Si l'ancienne gamme, modernisée cependant, conservent l'ancien 6 cylindres 14 CV, la nouvelle gamme sera bénéficiaire de la nouvelle motorisation.

T23 Major 1937
Solido
Dans l'esprit de Lago, ses voitures devaient se démarquer des modèles des années vingt et se rapprocher des lignes modernes des voitures qui rencontrent le succès, comme la SS Standard de Jaguar. Pour ce faire, et pour aider ses dessinateurs, il en fera d'ailleurs venir un exemplaire directement de Grande-Bretagne.
Très bon état.

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T 150
Les changements de règlement sont souvent l'occasion de créer de nouveaux modèles. La T 150 C était la réponse d'Anthomy Lago à la décision de l'ACF en septembre 1935 de relancer la catégorie Sport avec des cylindrées de plus de 4 litres.
A la suite du Grand Pris de l'ACF, en 1927, la marque Talbot a décidé de ne plus participer à aucune compétition automobile. Elle a tenu promesse jusqu'à l'arrivée d'Anthony Lago aux rênes de la branche française de l'entreprise, en 1934. Dès que la marque française devient indépendante du groupe anglais STD, Anthony Lago lance un programme sportif avec son ingénieur en chef Walter Becchia. En effet, les efforts d'Antony Lago ne se focalisent pas que sur l'habillage de ses modèles, la partie mécanique tient une grande place dans son programme, son désir étant, il faut le rappeler, de faire revenir la marque en compétition. Pour ce faire, il fait appel à son ingénieur Walter Becchia qui va, en partant du moteur de la T 120, développer un 6 cylindres plus puissant, de 3 litres, le T 150, correspondant à la catégorie du moment. Lorsque la nouvelle réglementation pour les voitures de Sport survient, Lago et Becchia décident de mettre en chantier un nouveau châssis et de porter à 4 litres leur moteur T 150. Le projet, baptisé T 150 C, prévoit un nouveau châssis sur un empattement de 265 cm. Il est constitué de deux longerons en U réunis par des entretoises et plusieurs traverses tubulaires. la suspension avant est à roues indépendantes, semblable à celle utilisée sur les voitures de série, avec un ressort transversal. A l'arrière, on trouve un pont rigide avec différentiel suspendu à deux ressorts semi-elliptiques. Le freinage est assuré par des tambours à ailettes en alliage léger Bendix de 355 mm, commandés par un système à câbles. En 1937, le diamètre intérieur des tambours passe à 400 mm et une commande hydraulique est proposée.

Cette Talbot T 150 C carrossée par Figoni est une surrestauration. Elle a perdu de son côté sportif.
Le moteur T 150 est un 6 cylindres en ligne en fonte à culasse hémisphérique, avec une distribution par arbre à cames latéral. Anthony Lago est le premier à utiliser et à produire ce type de moteur à culasse hémisphérique, juste avant BMW sur la 328. La culasse est en alliage. L'alimentation se fait par deux carburateurs Solex ou Zenith-Stromberg horizontaux. Pour les versions compétition, le taux de compression est de 7,8 à 1 contre 7 à 1 pour les moteurs de série. La puissance de 200 ch à 4.800 tr/mn annoncée par le constructeur paraît bien optimiste face aux 140 ch à 4.100 tr/mn des modèles de série et doit en réalité être plus proche des 175 ch. Leur première apparition en course sur le circuit de Miramas le 24 mai 1936 pour les 3 H de Marseille se solde par un abandon des deux voitures. En raison de l'annulation des 24 H du Mans 1936, leur deuxième course est le Grand Prix de l'ACF à Montlhéry, où 4 Talbot prennent le départ et se montrent très rapides. les trois voitures d'usine terminent 8e, 9e et 10e, retardées par de nombreux arrêts pour changer les bougies. Le 5 juillet, les trois Talbot se retrouvent à Reims, où la voiture de René Dreyfus termine 3e après avoir mené tout le début de course. La Talbot pilotée par Pierre-Louis Dreyfus termine 2e au Grand Prix du Comminges, encore une fois derrière la Bugatti de Benoist. C'est uniquement le manque de mise au point qui semble avoir privé les t 150 de victoire au cours de cette première saison.

   

Au GP de Pau en février 1937, la T 150 C de Raymond Sommer finit 2e et celle de Divo 4e. La première victoire de la Talbot arrive enfin au GP de Tunisie, que Sommer remporte sur la Bugatti de Jean-Pierre Wimille. La consécration suit aux 3 H de Marseille, où les Talbot de Sommer, Comotti et Divo terminent aux trois premières places. Pour le GP de l'ACF en juillet 1937, Talbot, aidé par les forfaits de Bugatti, réalise un nouveau triplé avec Chiron, Comotti et Divo, suivis de Sommer en cinquième position. En septembre, un doublé au Tourist Trophy sur le circuit de Donington vient confirmer la suprématie des t 150 C au cours de cette saison 1937.
T 150 SS
Les Lago SS, presque identiques et modifiées par les pilotes et les écuries, maintiendront encore le flambeau jusqu'à la guerre, et même après.
Le T 150 sera également monté sur une nouvelle machine de Grand tourisme baptisée T 150 Lago Special Grand Sport. Le châssis étudié par Becchia, est disponible en deux versions, empattement normal de 2,95 m et empattement court de 2,65 m. Dans les mois suivant, ce modèle court sera rebaptisé Lago Super Sport ou "SS". En fait, cette Talbot Lago SS reprend le châssis de la T150 C, la voiture de compétition expérimenté au cours de la saison sportive de 1936. Ce châssis est légèrement modifié à la hauteur de l'auvent. Entre les Lago SS de course et les Lago SS de route, seul le taux de compression était différent, plus élevé sur les voitures de compétition.
T 150 "Goutte d'eau" par Figoni & Falaschi

Antony Lago cherche le prestige, et pour atteindre son but, décide de faire habiller ses voitures par les grands carrossiers de l'époque. La T 150 SS passera donc entre les mains de Figoni et Falaschi qui réalisera, en 1937, le premier roadster "goutte d'eau". Ce dernier est très inspiré de la T 150 C de course. Les T 150 C d'usine ne sont pas en reste, recevant des carrosseries capables de rivaliser en élégance avec les Delahaye 135 et autres Bugatti 57 ou 59. Figoni habilla également les T23, dont une très belle Baby Grand Sport.
Expression ultime du grand tourisme de la fin des années trente, les Talbot lago SS carrossées en "goutte-d'eau" par Figoni et Falaschi se mesuraient aux Bugatti Atlantic, Delage D8-120 Aérosport de Letourneur & marchand et Delahaye 135 dans les concours d'élégance.

Depuis qu'il a pris le contrôle de Talbot à Suresnee en 1934, Anthony lago a surtout axé sa politique sur les 6 cylindres sportives haut de gamme. Au Salon de l'Automobile 1937, la gamme Talbot inaugure sa nouvelle 4 cylindres, la Minor. Pour compenser cette descente, la gamme des 6 cylindres sportives se voit simultanément enrichie d'une version à châssis court de la Lago Spécial, la Lago SS, qui a déjà fait les beaux jours des concours d'élégance au cours de l'été 1937 habillée en roadster. A côté des voiture de tourisme, qui comptent, en plus de la nouvelle 4 cylindres Minor, des 6 cylindres 3 litres et 4 litres, la gamme sportive propose pas moins de cinq versions 6 cylindres. La Baby 3 litres (2.996 cm3/90 ch), la Baby 4 litres (3.996 cm3/105 ch), la Lago Spécial (3.996 cm3/140 ch) et, tout en haut, notre nouvelle Lago SS.

Contrairement à toutes les autres Talbot, la SS est vendue uniquement en châssis nu. Avec ses 265 cm d'empattement, celui-ci pèse 850 kg, soit 130 kg de moins que celui de la Lago Spécial de 295 cm. Il faut ajouter, dans le meilleur des cas, 500 ou 600 kg de carrosserie, mais parfois bien plus si le client exige des équipements et des accessoires supplémentaires. Le moteur de la SS à trois carburateurs est le même que celui de la Lago Spécial à deux carburateurs. Il est basé sur le 6 cylindres à culasse hémisphérique de la Baby-Quinze, à course longue de 104,5 mm mais réalésé de 74 à 90 mm, ce qui fait passer la cylindrée de 2.693 cm3 à 3.996 cm3 et la puissance de 75 ch à 3.800 tr/mn à 140 ch à 4.100 tr/mn. Une version à trois carburateurs à buse de 35 au lieu de 32 est disponible, qui atteint les 200 ch à 4.800 tr/mn, au détriment de la fiabilité et surtout de la consommation.

     

Les quatre grandes marques sportives françaises disposent chacune d'un modèle sportif exceptionnel, capable de glaner des victoires en sport et de briller dans les concours d'élégance, la Bugatti 57, la Delage D8-120, la Delahaye 135 S et la Talbot t 150 Logo SS. Chacun a une personnalité propre et à travers eux les carrossiers les plus prestigieux de l'époque, eux aussi touchés par la crise, rivalisent d'inventivité et d'originalité pour toucher une clientèle fortunée de plus en plus rare. Cela explique la naissance de véritables chefs-d'oeuvre dans la deuxième moitié des années trente sous les signatures de Letourneur & marchand, Saoutchik, Chapron et, bien sûr, Figoni & Falaschi, pour ne citer que les plus en vue. C'est à la fin de l'année 1937 qu'apparaissent les carrosseries les plus extraordinaires sur Lago SS, les "gouttes d'eau" de Figoni & Falaschi. Toutes adoptent la vitre latérale en goutte d'eau, des ailes au dessin fuyant, un pare-brise très incliné, un embryon d'aileron sur le coffre, des motifs chromées en bas de caisse ou en cabot d'aile et des formes générales très fluides. Mais aucune n'est identique. Elles diffèrent par l'intégration de leurs phares, leurs roues flasquées ou non, le profil arrière avec ou sans décrochement et quelques autres subtilités. Ces chefs-d'oeuvre seront bien sûr copiés et imités avec plus ou moins de bonheur, mais ils sont bien dans l'air du temps et on peut les rapprocher des Bugatti Atlantic de Jean Bugatti ou des Delage Aérosport de Letourneur & Marchand. Saoutchik s'en inspirera également mais y ajoutera une touche bien plus exubérante.

T 150 SS 1938 Figoni Falaschi
Ixo
Au Mans, en 1938, c'est une Lago 150 SS pilotée par l'équipage Morel/Prenant qui décroche la troisième place de l'épreuve. Les Talbot brilleront encore en course jusque dans les années 50, notamment avec les  T26.
Un roadster T 150 C fut carrossé par Figoni Falaschi pour le pilote Pierre-Louis Dreyfus (alias Heldé pour éviter la confusion avec le niçois René Dreyfus, premier pilote Talbot) pour les 24 Heures du Mans 1939.
T 26

Dès 1942, avec son nouvel ingénieur en chef, Carlo Marchetti, qu'Antony Lago met au point un nouveau moteur, un 4,5 litres (4.482 cm3 et 170 Ch.) à deux arbres à cames latéraux, le "Lago 2 ac". En 1946, la Talbot Record T26 voit le jour, revendiquant le fait d'être la voiture de série la plus puissante et la plus rapide du marché. En général, elle fut vendue sous forme de châssis; le client se chargeant de faire construire la carrosserie par des artisans carrossiers, comme Saoutchick, Figoni et Falaschi, Antem, Pourtout ou Graber, voir Chapron. Il en extrapole une version plus sportive, la Grand Sport T 26 GS de 1947, cette dernière disposant d'une puissance de 190 Ch.
Antony Lago est parvenu au but qu'il souhaitait, revenir en compétition. Pour cela, il a désormais tous les atouts en main, de bonnes voitures et surtout, de bons pilotes. Les premières T26 monoplaces apparaissent en 1948, au Grand Prix de Monaco d'abord, puis au Grand Prix de San Remo ou Louis Rosier termine à la 5e place. En 1949, il projette de construire 6 voitures de sport biplace de ce type pour courir au Mans, mais en 1950, une seule voiture est véritablement prête pour prendre le départ de l'épreuve. C'est Louis Rosier, pilote préparateur de Clermont-Ferrand qui prend le volant de cette T26 GS. Elle porte en effet le même nom que la voiture de sport présentée au Salon de 1948, Lago voulant établir un lien entre sa gamme commerciale et ses voitures de compétitions.

T26 GS 1re au Mans 1950 Rosier/Rosier
Ixo
Louis Rosier, accompagné de son fils, remporteront l'édition 1950 des 24 Heures du Mans, la première et dernière victoire de la marque sur ce circuit. Une autre voiture sera présente, une Talbot Lago MD, celle de Pierre Meyrat et Guy Mairesse. Cet équipage termine à la seconde place. Au cours de cette édition, Louis Rosier battit tous les records et parcourut 3465,12 km à la moyenne de 144.38 km/h.

Talbot T26 GS Grand Prix 1948, une grande légende au Rétromobile 2007
Pour promouvoir ses produits sportifs, Talbot annonça la participation de ses voitures aux 24 Heures du Mans de 1956. Au Salon de 1949, Lago présentera une petite Talbot, la Lago Baby II T15, 15 CV, disposant d'un 4 cylindres de 2.690 cm3 pour 120 Ch. L'offre est alors complète. Cependant, la firme connaît de grave difficultés financière qui la pousseront à fermer l'écurie de course, les voitures étant vendues aux pilotes. La marque pourra toutefois se réjouir d'une victoire au cours de cette saison, le doublé de Rosier et d'Etancelin lors du Grand Prix de Hollande en juillet. Au cours des années suivantes, 1952, 53 et 54, quelques Talbot carrossées en barquettes participeront à quelques épreuves, mais sans grands succès. Entre temps, la marque proposa, en 1951 la Baby III 15 CV et la Record II 26 CV.
En 1951, la nouvelle T26 Lago Record II, version moins élitiste de sa T26 précédente, est dotée d'un moteur moins puissant de 2,5 litres. Ce modèle resta cependant un échec et seuls 400 exemplaires furent produits. La Grand Sport GLS fut proposée ensuite, la dernière des grosses Talbot. Là encore, ce ne fut pas un grand succès. c'est la dernière fois également qu'on entend parler du gros moteur 4,5 litres. Lago ne baisse pas les bras et en 1954, propose un coupé GS de taille réduite, dont la carrosserie est l'oeuvre de Carlo Delaisse. Disposant d'un moteur de 2,5 litres, elle ne dispose que de 120 Ch., qui lui permet d'atteindre les 180 km/h. On est loin des 210 Ch. de la T 26 GSL.

Lago T26 2,5 litres 1956
Ixo

Rétromobile 2007
Talbot 1950

La seconde photo montre la voiture présidentielle qui fut utilisée par René Coty et Paul Doumer.
Vincent Auriol, séduit par Talbot, décida de remiser la Renault Suprastella qui jusqu'alors avait rang de voiture présidentielle. Désormais, la favorite en titre sera une Talbot Lago Record. Issue d'une gamme lancée en 1946, la voiture connaît, pour l'occasion, un certain nombre d'aménagements. Son châssis est rallongé et porté à 3,5m et son moteur de 4,5 l comprenant deux carburateurs et six cylindres est la réplique de celui qui a permis de remporter la course mythique. Il développe prés de 200cv et équipe la voiture de série la plus rapide de l'époque avec plus de 200km/h. Commandée par Vincent Auriol, cette voiture, carrossée par Saoutchik servira également à son successeur, René Coty.

Dernières cartouches

Comme un dernier sursaut, Lago annonce sa participation aux 24 Heures du Mans de 1956. Pour ce faire, deux voitures, basées sur la technique de la 2500 sont préparées, avec une carrosserie type spider conçue par Pichon et Parat. Sous le capot, on trouve un moteur Maserati, celui de la 250 F. C'est un échec, les voitures ne terminant pas l'épreuve. Pourtant, en 157, deux nouvelles voitures sont au départ, préparées cette fois directement en Italie chez Maserati, avec de nouveaux moteurs. Là encore, sans succès.

Les hybrides

En 1957, en difficulté, la firme décide l'arrêt de la production de ses moteurs. On retrouvera donc des motorisations provenant d'autres constructeurs sous les capots des Talbot, comme pour la T14 LS qui hérita d'un 8 cylindres en V provenant de chez BMW. Le moteur diminué en cylindrée, pour entrer dans la catégorie des moins de 2.500 cm3, ne dispose plus que de 138 Ch. Ce coupé sera rebaptisé Lago América EXP 13. Malgré cette nouvelle monture, Talbot reste toujours dans les difficultés. Seulement douze exemplaires seront produits lorsque Antony Lago décidera, résigné, à jeter l'éponge. C'est à cette époque que Talbot trouve un accord avec Simca qui rachète l'entreprise. Simca va utiliser les châssis stockés dans l'entreprise pour concevoir les dernières Talbot, les Coupé Grand Sport V8 Simca, le moteur étant le V8 Aquilon d'origine Ford. On se souviendra qu'en 1958, Simca avait essayé une voiture disposant de ce moteur Aquilon, elle avait une caisse de Vedette montée sur un châssis Talbot. Cette expérience, restée sans suite, donna naissance à un exemplaire qui fut acquis par l'un des directeurs des Forges de Pont à Mousson. Autre prototype, celui de 1959, la Talbot Star-Six. Cette voiture futuriste, fut dessinée par l'américain Virgil Exner Jr, le fils du célèbre designer. Elle servira de publicité, lors du Salon de l'automobile de 1959, pour le lancement de la nouvelle Aronde P60 Etoile Six.
Si la marque "Darracq", jusqu'alors réservée au marché britannique, disparaît après la Seconde Guerre mondiale, remplacée par la marque "Lago", le nom sera conservé dans les statuts français de "Talbot-Lago" jusqu'à son rachat par Simca en 1958. C'est ce qui se passera pour le nom de Talbot, qui disparaîtra à son tour en 1970, mais, conservé lui aussi dans le patrimoine de l'entreprise.
Georges Heriel, successeur de Pigozzi à la tête de Simca, parla un jour de renaissance de la marque Talbot, avec une voiture de haut de gamme propulsée par un 6 cylindres Chrysler. Ce projet resta sans suite et il faudra attendre l'arrivée de Peugeot pour voir le nom de Talbot renaître. En attendant, Simca allait devenir Chrysler-France.