TALBOT LONDON    

Dernière mise à jour : 01/07/2010

La Talbot anglaise...

Petit historique

Charles Henry John Chetwynd-Talbot, Comte de Shrewsbury (1860/1921)

Née en 1903 sous la forme d'une société de droit anglo-saxon sise à Londres, la marque Clément-Talbot cesse rapidement d'importer des Clément-Bayard françaises pour produire des types totalement "british" en 1914. Après la Grande Guerre, le problème de la reconversion de l'usine de Londres entraîne l'abandon des types de la gamme 1915 en faveur de voitures plus modestes mieux adaptés au marché.

Ateliers Talbot London dans les années 30
Au début du siècle, Adolphe Clément dispose de nombreuses usines, dont celle située au Quai de Javel et qui deviendra plus tard la propriété d'André Citroën. Clément propose, en France, les Clément-Gladiator et les Clément-Panhard, des voitures qui rencontrent un beau succès, principalement une voiturette 4 HP 1/2 de 1901. Conquis, lord Shrewsbury and Talbot achète la licence de fabrication des voiturettes Clément pour la Grande-Bretagne et fonde la société Clément-Talbot Ltd. Jusqu'en 1906, cette entreprise produira les mêmes voitures qu'en France. Dès 1907, la firme produira ses propres modèles sous le nom de Talbot. En France, Adolphe Clément à créé une nouvelle société, Clément-Bayard.

Adolphe Clement (1855/1928)

Au début du siècle, Adolphe Clément dispose de nombreuses usines, dont celle située au Quai de Javel et qui deviendra plus tard la propriété d'André Citroën. Clément propose, en France, les Clément-Gladiator et les Clément-Panhard, des voitures qui rencontrent un beau succès, principalement une voiturette 4 HP 1/2 de 1901. Conquis, lord Shrewsbury and Talbot achète la licence de fabrication des voiturettes Clément pour la Grande-Bretagne et fonde la société Clément-Talbot Ltd. Jusqu'en 1906, cette entreprise produira les mêmes voitures qu'en France. Dès 1907, la firme produira ses propres modèles sous le nom de Talbot. En France, Adolphe Clément à créé une nouvelle société, Clément-Bayard.
Après la Grande Guerre, le problème de la reconversion de l'usine de Londres entraîne l'abandon des types de la gamme 1915 en faveur de voitures plus modestes mieux adaptées au marché. Le concept de la voiture populaire bon marché est si nouveau que bien des marques établies ont du mal à le traduire dans les faits. C'est le cas de Talbot de Londres, que la société A. Darracq and Co Ltd anglaise a rachetée en 1919 avant d'intégrer le consortium Sunbeam-Talbot-Darracq (STD) en 1920. Entre-temps, le nom de Clément a disparu.

Alexandre Darracq (1885/1931)

Né le 10 novembre 1855 à Bordeaux, Alexandre Darracq a suivi des études générales et techniques, puis entre comme dessinateur-projeteur à l'arsenal de Tarbes. Il fait ensuite un séjour chez Hurtu et Hautin, alors fabricants de machines à coudre. Son parcours le mène par la suite dans différentes entreprises de mécanique, où il acquiert une bonne expérience en matière de production industrielle, avant l'apparition de l'automobile. Il sera à l'origine des marques Darracq, Perfecta et  Gladiator, du groupe STD, et sa filiale en Italie donnera naissance à Alfa Romeo.

S.T.D côté français

En 1919, la firme Darracq, constructeur de premier plan et fondateur en 1896 de la marque Gladiator, est l'un des plus ancien constructeur français. Darracq diffuse ses produits dans toute l'Europe et a vendu des licences en Allemagne (Opel), et fondé des filiales en Italie, la Societa Italiana Automobili Darracq (future Alfa) et en Grande-Bretagne, la A.Darracq and Co Ltd . En France, les usines sont situées à Suresnes, et tournent plein régime. Cependant, le créateur n'est plus aux commandes de l'entreprise, Darracq ayant démissionner en 1912. Alexandre Darracq, créateur des Gladiator, avait cependant démissionné depuis 1912 pour créer la marque Perfecta. La firme fut, à cette époque, rachetée par la filiale anglaise et c'est un anglais, Owen Clegg qui dirige l'entreprise. On note que la filiale anglaise est gérée, elle, par le français Louis Coatalen. En 1912, la firme se mit à produire des copies conformes de la Rover Twelve. En 1919, la firme française absorbe Clément-Talbot, qui vient de vendre son entreprise à André Citroën. La production confiée à Darracq quittent le quai de Javel pour Suresnes. Notez que les initiales gravées sur les murs à l'entrée des usines Citroën du Quai de Javel, "AC", ne sont pas celles d'André Citroën, mais bien celles d'Adolphe Clément. En 1920, un consortium voit le jour, réunissant trois firmes, Sunbeam, Talbot et Darracq. Dès lors, et ce jusqu'au début des années trente, les voitures de Suresnes prennent le nom de Talbot-Darracq, les anglaises Clément-Talbot conservant le seul nom de Talbot. Quant aux voitures exportées en Grande-Bretagne, elle prendront le nom de Darracq pour ne pas faire de l'ombre aux Talbot anglaises.

Autres temps, autres clients

Le concept de voiture populaire bon marché est si nouveau que bien des marques établies ont du mal à le traduire dans les faits. C'est le cas de Talbot de Londres, que la société A. Darracq and Co Ltd anglaise a rachetée en 1919 avant d'intégrer le consortium Sunbeam-Talbot-Darracq (STD) en 1920. Le puissant groupe industriel ainsi créé, au lieu d'unir ses ressources pour lancer des types populaires produits en grande série, laisse à ses marques une grande autonomie de création. Pour Talbot (London), le problème se pose dès 1917 du futur renouvellement des types de 1914, difficiles à moderniser et quelques peu concurrents des grandes Sunbeam.

Georges Roesch (1891/1969)

Genevois comme Mark Birkigt, Georges Roesch est né en 1891 et fut élevé à l'école de l'horlogerie et de la mécanique de précision suisses. Il en appliqua les principes à l'automobile, choisissant les meilleurs aciers et les meilleurs alliages, les machines les plus précises, les pièces mobiles les plus légères et les mieux équilibrées, les jeux de fonctionnement les plus justes, etc. Résultat : il obtint un rendement de 53 chevaux/litre à 6.000 tr/mn sur un 10/23 poussé, supérieur au double arbre de course des 1500 Talbot. Cet ingénieur mécanicien de formation se forma chez Delaunay-Belleville et Renault avant d'émigrer en Angleterre en 1914. En 1925, il fut chargé par Louis Coatalen, directeur technique du Groupe STD, de relancer la marque Talbot de Londres selon ses propres choix techniques. Pendant dix ans, il produisit ces étonnantes Talbot London 90, 105 et 110, jusqu'à la reprise de la marque par le Groupe Rootes. Georges Roesch disparut le 7 novembre 1969.
En 1918, le jeune ingénieur suisse, Georges Roesch, est entré chez Clément-Talbot, où on lui confie l'étude des futures Talbot de la génération 1920-1924. Ses vues modernes, qui lui font préférer les petits moteurs à hauts rendement, semblent en phase avec les demandes attendues du marché. Mais si les grosses Talbot avaient été des automobiles de luxe, les petites ne doivent pas déroger. C'est dans ce contexte que Roesch étudie dès 1919 un petit moteur dit 8/18 à 4 cylindres et soupapes en tête de 970 cm, cylindrée ridiculement basse aux yeux de certains dirigeants. D'ailleurs, ce moteur est prévu pour un type Darracq, et Roesch est envoyé à l'usine Darracq de Suresnes en vue de développer pour le marché français, sur lequel les petites cylindrées bénéficient d'un avantage fiscal. A Paris, Roesch a travaillé sue les moteurs Talbot-Darracq de course 1,5 litre à 2 arbre à cames en tête, dont il n'apprécie pas la complexité. Il est convaincu qu'un moteur à soupapes en tête simplement culbuté peut avoir un rendement équivalent tout en coûtant beaucoup moins cher à fabriquer. Le grand patron du groupe STD, Louis Coatalen, lui donne carte blanche à la direction technique de Talbot (London). Roesch revient à Londres en 1921 avec les plans d'un châssis allégé, sur lequel il installe le moteur 8/18 donnant 20 chevaux. Ce châssis ne peut raisonnablement recevoir que des fabrication façon Talbot se traduit par un poids assez conséquent. Cette contrainte limite donc la diffusion du type et Roesch doit prévoir un peu plus grand.
10/23

Afin de rester dans la catégorie fiscale anglaise des 10 HP, Roesch développe son petit 4 cylindres pour en faire un groupe de 1.074 cm3 donnant 23 chevaux à 3.000 tr/mn, régime élevé à l'époque pour un moteur de tourisme. Pour arriver à ce résultat, il a particulièrement travaillé la géométrie des conduits de gaz, la dimension des soupapes et l'allègement des pièces mobiles afin d'améliorer les montées en régime. Solution moderne, le bloc-cylindre et le carter supérieur sont coulés en bloc. L'usinage d'une telle pièce est plus délicat e plus coûteux. Quoi qu'il en soit, le moteur 10/23 permet d'utiliser un châssis plus long, apte à recevoir des carrosseries à quatre/cinq places et de proposer des conduites intérieures confortables malgré la puissance modeste. La 10/23 connaît donc un certain succès du fait du prestige attaché au nom de Talbot. Les équipements et les finitions (garnitures, instruments de bord, accessoires, peintures, roues, glaces de sécurité) sont dignes de la marque et distinguent la 10/23 des 10 HP courantes. Mais leur prix aussi, car la mécanique de Roesch, plus que perfectionniste, ne laisse guère de marge au constructeur. La complexité des usinages et des assemblages interdit toute production en masse et, paradoxe, la qualité des 10 HP Talbot limite leur succès. Un premier petit 6 cylindres extrapolé du 10/23 est un échec commercial.

      

En 1925, l'activité de l'usine Talbot de Londres tangente le zéro et louis Coatalen charge Roesch d'en reprendre la direction générale en réorientant la production vers des types plus étoffés susceptibles d'être vendus plus cher et, donc, de dégager quelques profits. C'est ainsi que Georges Roesch créera, en 1926, un nouveau 6 cylindres.
Talbot 75 et 90
Les voitures Talbot britanniques produites à Londres jusqu'en 1935 par le groupe STD sont l'oeuvre de l'ingénieur suisse Georges Roesch, entré chez Clément-Talbot GB en 1918. Dès 1926, les Talbot britanniques crées par Roesch entament une évolution technique qui va mener au moteur de production moderne, exempt de solutions techniques trop compliquées, en passant par l'épreuve sans appel de la compétition. C'est en 1925 que le jeune ingénieur est appelé à prendre la tête des études de la firme Talbot London Ltd., reçoit carte blanche du grand patron, Louis Coatalen, pour appliquer ses solutions. La situation de la marque anglaise intégrée au groupe STD est à cette époque dramatique et l'usine reste pratiquement fermée en 1925, pendant qu'il dessine et fait fabriquer ses prototypes dont dépendra pour une grande part la survie du constructeur. Roesch cède à la vogue du 6 cylindres léger, type de moteur qui dot en principe combiner silence, souplesse et nervosité afin de faciliter la conduite et réduire les vibrations. Mais l'économie reste le maître mot : économie sur les coûts de construction et économie pour l'utilisateur. Or Roesch est justement partisan de moteurs simples dont le rendement élevé ne doit pas dépendre de solutions sophistiquées comme les arbres à cames en tête. Grandes soupapes en tête simplement culbutées, équilibrage très poussé des organes mobiles, qualité des matériaux et précision extrême des usinages, calcul des meilleurs jeux de fonctionnement, filtration rigoureuse et refroidissement de l'huile, graissage sous pression élevée sont quelques unes des solutions qu'il retient pour gagner de la puissance sans entraîner des hausses de consommation. Sa première 6 cylindres légère, la 14/45 de 1926, d'une cylindrée limitée à 1,66 litre, délivre 41 ch. à 4.500 tr/mn, un brillant résultat en production à l'époque. En fait, les moteurs de Rozsch tournent à plus 5.000 tr/mn avec la même sécurité que les autres à 3.000.
Le châssis de la nouvelle Talbot, pratiquement inchangé, sera celui des 75, 90, 105 et 110 ultérieures et son petit moteur remarquablement étudié, sera développé pendant près de 10 ans.

Le châssis est tout aussi soigné. Sa grande rigidité profite de longerons à âme haute, d'un fort croissillon central et d'un auvent faisant fonction de renfort. Grâce au bon équilibrage des organes mobiles et à l'absence de vibrations, le moteur, boulonné directement sur les longerons, sert à rigidifier l'avant au grand bénéfice de la précision de direction, qualité rare à l'époque. La nouvelle Talbot est un roc sur sa trajectoire.
Le succès de la nouvelle Talbot London, longuement essayé par son créateur sur les routes suisses, est immédiat. Du coup, elle relance la marque et la production dépasse 50 châssis par semaine. La marque londonienne retrouve le moral et envisage d'autres développements. Roesch s'attelle donc à faire évoluer son modèle 6 cylindres. Sans modifier beaucoup le châssis, qui peut accepter des puissances supérieures, il adapte des freins plus grands, des amortisseurs hydrauliques et le graissage centralisé. L'architecture du moteur est conservé, mais Roesch adopte cette fois un vilebrequin à sept paliers. Le nouveau moteur apparaît en 1928, avec une cylindrée de 2,3 litres et une puissance de 76 ch. à 4.500 tr/mn. La nouvelle 75 reçoit une boîte présélective Wilson, des freins plus grands, des volets de radiateur thermostatiques, un système de graissage centralisé, des freins sous gaines et des amortisseurs hydrauliques. La pompe à eau est entraînée directement par le moteur.
Les sportifs s'intéressent à la nouvelle Talbot 75 et à ses performances. Sous leur pression, Roesch en dérive la 90 3 litres poussée à 93 ch en version haute compression au benzol pur. La 90 est préparée pour disputer les Double-Twelve Hours (deux fois 12 h) de Brooklands de 1930, avec environ 90 ch à 5.000 tr/mn. Malheureusement, un double accident élimine les Talbot, mais les 90 brillent au Mans, puis en Irlande. Leur solidité incite Roesch à agrandir encore le moteur. C'est ainsi qu'il va produire la 95 et sa version sportive, la 105.
Talbot 95 et 105

Talbot 105 3 litres 1931

    

Les résultats obtenus en course mènent à la "95", une 3 litres sur laquelle les soupapes verticales en quinconce peuvent être encore agrandies afin d'atteindre 100 ch. puis 140 ch. sur les versions "105" à haute compression.
La course a coûté cher à Talbot tant en France qu'en Grande-Bretagne, et les responsables de la firme sont plutôt réticents. Ce sont des clients distributeurs de la marque, et notamment la firme Fox and Nicholl de Londres, qui préparent les Talbot pour les grandes épreuves d'enurance et les rallyes. Après de brillantes prestations effectuées au Mans en 1930 par les "90" (1res à l'Indice et 3e et 4e au général derrière les Bentley d'une cylindrée double), et la même année au GP d'Irlande, au Tourist Trophy et aux 500 Miles de Brooklands, les "105" de 3 litres prennent le relais en 1931. Pour mieux lutter dans la catégorie 3 litres, Roesch a étudié un moteur de 2,9 litres qui équipe les nouvelles 95 en version sage et la variante dite 105, dont la compression portée à 10,2 : 1 permet d'en obtenir jusqu'à 140 ch. Ces magnifiques voitures roulent à 140 km/h en version tourisme, tandis que les 105 dépassent largement 170 km/h, dans un silence tout à fait insolite pour des voitures de course. Les 105 s'imposent dans leur catégorie aux 2 x 12 Heures de Brooklands (victoire au handicap), aux Tourist Trophy et aux 500 Miles, terminant 3e au Mans et 2e de la Coupe Rudge. L'année suivante, les Talbot 105 répètent leurs succès en marquant toujours les spectateurs par leur étonnant silence en course.
Sur route, les 105 brillent à la Coupe des Alpes en 1931 en remportant une Coupe des Glaciers. Les voitures de Fox and Bicholl remportent l'épreuve en 1932 ainsi que le prix par équipe. Les talbot 105 de l'équipe äss and Joyce, avec le soutien de l'usine, réitèrent ces succès en 1934 avec le trio des célèbres BGH 21, 22 et 23, encore équipées en principe de moteur 3 litres poussés à 140 ch.

Une 105
Talbot 110
La fiabilité et les succès en compétition incitent encore l'usine à qugmenter la cylindrée sur les 110 (3,34 litres), dont les versions tourisme disposent de 123 ch. et les "compétition" de plus de 160 ch. ! Toutefois, ces voitures sont chères et la crise de 1930 mène à la cession du Groupe STD en 1935 au Groupe Rootes Ltd., qui va rationaliser les productions, c'est-à-dire rapprocher les Talbot des productions plus courantes du groupe. Seules subsisteront au catalogue les 3,5 litres de tourisme, produites au compte-gouttes jusqu'en 1939, ultimes versions du chef-d'oeuvre de Roesch.

Les BGH

Sur les trois voitures de la Coupe des Alpes 1934, immatriculées BGH 21, 22 et 23, la troisième fut encore plus poussée. Equipée d'un moteur 3,3 litres Type 110, comprimé à 11,4 : 1, elle disposait de 164 ch. à 4.800 tr/mn. Malgré sa carrosserie à quatre places, elle boucla le tour d=à Brooklands à près de 200 km/h de moyenne. A la Coupe des Alpes, c'est cependant la BGH 21 qui se montra la plus rapide du plateau. Pilotée par le couple Wisdom, la voiture, allégée par rapport à 1932, réalisa la montée la plus rapide du col du Stelvio, en gagnant 6 mn sur son temps idéal. La boîte de vitesses présélective Wilson qui équipait les Talbot n'était pas étrangère à cette performance.

   

La BGH 22 de la Coupe des Alpes 1934

Fin

En 1966, les spectateurs des deuxièmes Coupes de l'Âge d'or courues à Rouen-Les-Essarts eurent la surprise de voir une grosse torpédo de tourisme terminer dans le même tour que les rapides monoplaces ERA. Ce ne fut pas leur seul sujet d'étonnement... Sur les talons des ERA dévalant vers le virage du Nouveau Monde dans le hurlement de leur compresseur et le grondement de leur échappement plus que libre, une torpédo verte passait dans un silence stupéfiant et pratiquement à la même vitesse. Certes, sa cylindrée était double, mais la performance n'en était pas moins étonnante. Beaucoup d'amateurs à l'époque découvrirent cette curieuse Talbot qui n'avait rien à voir avec les productions de Suresnes.