LA SALLE    

Dernière mise à jour : 12/05/2010

Le catalogue d'un artiste

Petit historique

En 1927, le succès commercial remporté par la gamme La Salle, division soeur des prestigieuses Cadillac, reste un des évènements majeurs de la scène automobile américaine. C'est aussi, pour la GM, l'occasion de s'adjuger les talents de Harley Earl, un styliste plein d'avenir.

Harley J. Earl (1893/1969)

Harley J. Earl est un jeune artiste dessinateur de talent, passionné par l'étude des formes des carrosseries automobiles. Cette aptitude est largement exploitée depuis 1919 par Don Lee, le principal distributeur de la marque Cadillac de la Côte Ouest. Une région privilégiée des Etats-Unis qui profite pleinement à la division d'élite de la General Motors. Mais la clientèle exubérante de la toute proche communauté de Hollywood exige toujours plus. C'est à ce moment précis qu'intervient toute la créativité de Harley Earl, qui dévoile alors son catalogue personnel, comportant de magnifiques aquarelles de carrosseries spéciales, le plus imaginatif du sur mesure, qui reste toutefois parfaitement conciliable avec les châssis de la maison. Bien sûr, le coût est prohibitif, mais il importe peu, les demandes émanant le plus souvent des stars du grand écran du moment, telles Douglas Fairbanks, Mary Pickford, Tom Mix ou Fatty Arbuckle.
Au début du siècle, Lawrence P. Larry Fisher a fondé, en compagnie de ses six frères, une société de carrosserie automobile qui, en 1916, est déjà capable de produire annuellement 370.000 caisses pour divers constructeurs. Ce potentiel industriel n'échappe pas aux dirigeants de la General Motors, qui intègrent cette entreprise au groupe en 1926. Un an auparavant, Larry Fisher a été nommé président de la Cadillac Motor Car Division. Ce dernier a pleinement remarqué les grandes capacités de Earl lors d'une tournée promotionnelle en Californie. Il prend contact avec celui-ci, au cours de l'hiver 1925, afin de lui proposer une délicate mission. Les décideurs de Cadillac tentent d'imaginer depuis plusieurs mois un nouveau produit, un véhicule haut de gamme qui serait cependant, plus abordable et moins ostentatoire qu'un Cadillac, et aussi d'allure plus jeune afin de contrer le succès insolent de la Packard Six. Commercialement, la voiture devra se situer entre la Buick la plus chère et la Cadillac la meilleur marché. Aucune proposition concernant cette nouvelle marque n'ayant enthousiasmé Fisher, Harley Earl et son imagination ensoleillée sont patiemment attendus sous les cieux grisonnants du Michigan.

Harley Earl, au volant de la La Salle 1927, avec Laurence P. Fisher
Earl débarque à Détroit le 6 janvier 1926 et se met aussitôt au travail, au sein du bureau d'études expérimentales des carrosseries de Cadillac, situé sur Clark Avenue. Il est assisté dans sa tâche par Ralph Pew, un ingénieur des méthodes, Dave Anderson et Jack Parks, respectivement formeur sur bois e spécialiste de la réalisation de maquettes à l'échelle 1, une technique d'évaluation encore rare à cette époque. La principale influence subie par Earl pour cette première commande, particulièrement visible par le dessin de la calandre, vient de l'Hispano-Suiza, une marque pour laquelle le jeune Californien nourrit une profonde admiration depuis ses visites répétées au Salon automobile de Paris. Cette légèreté toute européenne, que l'on retrouve sur les lignes générales de la machine, contribue grandement à l'acceptation du projet par Larry Fisher et le président de la GM, Alfred P. Sloan, ainsi qu'à son vif succès auprès de la clientèle.
Après l'acceptation définitive du projet La Salle, Harley Earl est envoyé à Paris aux frais de la General Motors, pour visiter le salon automobile de 1926 et parfaire ses notions d'esthétisme européen. Il est accompagné du président Sloan et de William S. "Big Bill" Knudsen, le patron de la division Chevrolet. Les trois hommes rendent ensuite visite aux ateliers du carrossier Hibbard et Darrin, où Sloan passe commande de cinq études de carrosserie qui pourraient être utilisées par diverses marques de la GM. Ces projets seront menés à bien et payés, mais ils resteront sans suite industrielle.

Premier modèle

Le public découvre la nouvelle venue lors du Salon automobile de Boston, qui ouvre ses portes le 5 mars 1927. Symboles des influences européennes, le patronyme et le blason de la marque sont empruntés à l'aristocrate René Robert Cavelier de La Salle, envoyé spécial du roi Louis XIV vers le nouveau monde pour établir des comptoirs en Louisiane. La gamme La Salle comprend onze configurations de carrosserie, toutes d'origine Fisher. Huit sont posées sur un châssis de 315 cm d'empattement, soit 17 cm de moins que l'équivalence Cadillac. Trois autres caisses restent disponibles au catalogue, fixées sur un châssis dont l'empattement a été porté à 340 cm. C'est sur ce dernier que sont élaborées (uniquement sur demande) par Fleetwood, une autre filiale de la GM, de somptueuses limousines ou coupés de ville.

26.807 La Salle sont assemblées entre 1927 et 1928. A titre comparatif, 47.136 Cadillac passent les contrôles de l'usine de Clark Avenue. L'ultime La Salle sera construite en 1940 et sera remplacée, pour la saison 1941, par une Cadillac au tarif attrayant, le Type 61. Toutes les La Salle ont bénéficié d'une mécanique à 8 cylindres en V, excepté les millésimes 1934, 1935 et 1936, qui abritent sous leurs longs capots un moteur 8 cylindres en ligne fourni par la division Oldsmobile.

A suivre...