CORRE - LA LICORNE    

Dernière mise à jour : 12/05/2010

La suite des Corre...

    

Petit historique

L'histoire de Corre-La Licorne débute au début du siècle, avec la création par Jean-Marie Corre de la Compagnie française des Automobiles Corre. Batissant sa renommée en compétition, il est cependant contraint de revendre son entreprise après un long procès avec Renault qui a mit ses finances au plus bas. Un de ses ingénieurs, Waldemar Lestienne, propose à son père, Firmin Lestienne, de reprendre l'entreprise. L'opération est finalisé en 1907 et le nom de La Licorne est adoptée. La firme prend alors le nom de Compagnie française des Automobiles Corre - La Licorne.

Firmin Lestienne

En 1907, Lestienne occupe donc le poste de directeur général de la nouvelle société, baptisée Corre-La Licorne. Le nom de La Licorne est adoptée en hommage à l'animal mythique qui figure sur les armoiries de la famille Lestienne. Il place ensuite son fils au poste de directeur du bureau d'études, ce dernier continuant à être secondé par l'ingénieur Bodot. Dès les débuts, la nouvelle société intensifie la production des voitures de tourisme et, au Salon de Paris de 1908, la marque Corre-La Licorne propose huit modèles, composée de deux monocylindres de 5 et 8 HP, des 4 cylindres de 5, 8, 10, 12, 18 et 30 HP. Tous ces modèles sont dotés de moteurs De Dion-Bouton. Ces automobiles se démarquent de suite par une mise au point particulièrement soignée. Elles arrivent à point pour remplacer les anciens types J, K et L, que la marque produira encore à 34 exemplaires au cours de l'année 1908. En 1908, la marque produira les types P et O, puis FX, JX et OX, soit 104 exemplaires. En 1909, la production atteindra les 184 exemplaires, les 254 exemplaires en 1910. En compétition, c'est le pilote Collomb qui assure la renommée de la marque. Pendant 20 ans, il assurera la promotion de la marque en compétition. Dès le départ, il prendra le volant de la C1 remodelée. Malheureusement, ces débuts seront difficiles et il devra abandonner sur le Circuit de Dieppe en 1907. En 1908, il terminera cependant 5e à la Coupe des Voiturettes. Waldemar Lestienne prendra également le volant de ses voitures, remportant la course de côte de Château-Thierry la même année, sur une voiture de série.
En 1910, une nouvelle 10 HP voit le jour, toujours dotée d'un monocylindre De Dion. Ce modèle va devenir extrêmement populaire et conforte l'excellente réputation de la marque. Ce succès permet d'étendre la gamme et d'offrir ainsi de nouveaux modèles en 12, 14 et 30 HP. C'est au cours de cette période que la marque dépose plusieurs brevets intéressants, comme celui d'un dispositif de refroidissement pour moteurs, ou celui d'une originale pédale accélératrice ou retardatrice pour moteurs d'automobiles.

Premier moteur maison

La principale innovation technique de Corre-La Licorne arrive en 1911. En effet, la marque, au sein d'une gamme déjà pléthorique, propose un nouveau modèle 12 HP doté du premier moteur maison. Ce moteur est un 4 cylindres, accolé à une boîte de vitesses à trois rapports. Ce moteur sera décliné ensuite en 8 et 12 HP, et sera doté d'une boîte à 4 rapports. L'année suivante, un nouveau moteur arrive, de type monobloc, un quatre cylindres verticaux qui va s'imposer dans le tour de France Automobile en 1912 et en 1913. En cinq ans, la marque La Licorne s'est installée dans le Gotha des grands constructeurs automobiles français, faisant même la nique à Renault qui pensait pourtant avoir réussi à faire rendre gorge à un concurrent dangereux. La gamme s'enrichie encore, avec de nouveaux modèles dotés de 4 cylindres Chapuis-Dornier et Ballot de 2,1 et 1,3 litres.
La puissance des automobiles La Licorne n'est pas énorme, ce qui ne manque pas de faire causer les détracteurs de la marque. Cependant, les véhicules sont robustes et fiables, ce qui compense le manque de performances. Les clients ne s'y trompe pas d'ailleurs, puisqu'ils sont nombreux à privilégier une voiture sans soucis à une voiture sportive. Pour le client lambda, une voiture doit servir, et non pas passer son temps au garage.

    

Les 4 cylindres en avant

1914 - 1918

La guerre va mettre un terme brutal à l'expansion de l'automobile. La marque La Licorne n'y échappe pas et va produire exclusivement du matériel de guerre. Elle acquiert pendant cette période trouble des outillages modernes et sa trésorerie devient confortable. En 1918, cette trésorerie lui permet de relancer ses fabrications civiles sur la base des 4 cylindres de 1914. Le fer de lance est alors une petite voiture équipée d'un moteur Ballot à soupapes latérales de 1.244 cm3. Très vite, une 8/10 HP est proposée, avec un 4 cylindres de 1,3 litres de cylindrée, une 9/12 HP et une 12/15 HP, deux voitures disponibles en plusieurs versions à deux ou quatre places.

Utilitaires

Corre-La Licorne propose également, en utilisant le châssis de la 8/10 HP, un fourgon commercial, le premier d'une longue série de véhicules industriels. En parallèle à la production des voitures de tourisme, cette gamme d'utilitaires va se développer, donnant naissance à la camionnette "Normande", avec une armature en bois apparente à l'arrière qui sera adoptée par la suite par une majorité de constructeurs. Corre concevra aussi des camions, des autobus, utilisant des châssis de 2 et 2,5 tonnes, avec moteur quatre cylindres de 80/140 HP. Ces autobus seront employés par plusieurs compagnies, soit pour assurer des liaisons avec les Chemins de Fer de l'Etat, soit à des fins touristiques, principalement dans les Alpes. La marque équipe les messageries Hachette, entre autres gros clients. Cette production de véhicules industriels de petit tonnage, très rentable, permet de limiter les prix des modèles de tourisme et des petits utilitaires à des niveaux qui les rendent intéressants.

Retour à la compétition

Après la guerre, et malgré ses nombreuses déconvenues en compétition dans les années 10, la marque persiste et engage une voiturette conçue en 1914 par l'ingénieur Causan dans la Coupe Internationale des Voiturettes de 1920. Cette voiture, Type BV 1.400 cm3 de 1913 est réactualisée et se présente au Mans entre les mains de Collomb, fidèle à la marque. Le pilote devra abandonner sur rupture d'embrayage, et Firedrich sur Bugatti l'emporte. Toutefois, Collomb a démontré que sa voiture semblait plus rapide que les "pur sang" de Molsheim. Animé par un nouveau moteur quatre cylindres à 4 soupapes inclinées par cylindre et commandé par deux arbres à cames placés dans le carter, la voiturette s'affirme donc comme "la plus rapide du monde". Ce qui n'est pas si présomptueux puisqu'elle s'adjuge plusieurs victoires et records, dont le kilomètre lancé à plus de 108 km/h.

Corre-La Licorne 1500 des 24 Heures du Mans 1925
Firme modeste, Corre-La Licorne, installée désormais à Neuilly, 37 rue de Villiers et 12 rue de Rouvray, engage deux voitures aux 24 Heures du Mans de 1923. Les deux voitures ayant parcouru plus de 1.200 km, la marque peut participer à l'édition suivante. En 1924, ce sont trois voitures qui sont alignées, trois torpédos W16W4, dotés d'un moteur SCAP 4 cylindres à culbuteur de 1.500 cm3. Ces véhicules, baptisés 10 CV Sport et dotés d'une longue pointe arrière, ne finiront pas la course. Les Coore-La Licorne remporteront toutefois les 24 heures de Belgique peu de temps après. En 1925, sur trois voitures au départ, deux prennent les deux premières places de la catégorie 1500. La marque remporte également Les Routes Pavées dans la même catégorie, preuve certaine de la robustesse et de la fiabilité des La Licorne. En 1926, la marque termine 10e au Mans avec le type W16W4, mais l'abandon de deux autres voitures équipées du nouveau moteur maison élaboré par Causin marquent un coup d'arrêt brutal à la politique compétition de La Licorne. Pour l'occasion, les deux La licorne étaient équipées d'un ambitieux 6 cylindres en ligne de 1.500 cm3 à 1 arbre à cames en tête. ce moteur est en fait une étude de l'ingénieur Némorin Causan, créateur en 1908 du monocylindre de la Delage victorieuse à Dieppe. La marque ne reviendra pas au Mans en 1927. Elle renonce également à commercialiser la 1500 de course sous la forme d'une 2 litres 6 cylindres. Le moteur 1500 équipera toutefois des voitures de course. Avec deux arbres à cames en tête, cette 1500 de course de 1927 sera souvent victorieuse aux mains de Michel Doré entre 1927 à 1929. En vitesse, elle s'octroie notamment le luxe de décrocher des records de tour, grâce à une vitesse de pointe supérieure à 165 km/h. La marque continuera de s'aligner au Tour de France Automobile, pour faire briller ses autos, comme ce fut le cas en 1925 avec un beau tiercé, les trois voitures terminant l'épreuve en tête, à 4 mètres l'une de l'autre !

Corre-La Licorne Causan 6 cylindres 1500 double ACT et compresseur, en 1927, pilotée par Michel Doré
Type 10 HP
Le début des années vingt apporte cependant de nombreux progrès, et Corre-La Licorne doit s'adapter aux nouvelles lois du marché. Comme beaucoup d'autres entreprise, et sous la pression d'un certain André Citroën, nouveau venu dans le monde de l'automobile, la marque doit vite s'adapter. Elle présente ainsi, au Salon de Paris de 1922, une 10 HP taxée en fait pur 9 CV, avec un 4 cylindres de 1,7 litres à soupapes latérales solidement construit et une boîte à 4 vitesses prévue pour les versions commerciales. Equipée d'un démarreur et de l'éclairage électriques, la voiture est proposée sous diverses formes : torpédo quatre places, torpédo sport deux/trois places, conduite intérieure et la nouveauté, la "Normande", dont la maison Corre revendique à juste titre l'invention en 1920. Ce type de véhicule va connaître un beau succès auprès des artisans et des cultivateurs car il s'agit d'un véhicule mixte et polyvalent, ancêtre des breaks modernes. Sur demande, la 10 HP peut être équipée de freins sur les roues avant.

    

La Licorne 10 HP B7W4 1922 et un torpédo commercial, plus vendu que la conduite intérieure
En 1922, la 10 HP Corre-La Licorne est cataloguée 12.500 francs en normande, 13.600 francs en torpédo deux/trois places, 15.600 francs en torpédo quatre places ponté et 23.000 francs en conduite intérieure quatre places, taxe luxe comprise. Une Citroën B2 également livrée complète en ordre de marche coûte alors de 14.000 à 21.600 francs.

1927

Fin 1927, la firme déménage, quittant Neuilly pour aller s'installer dans des locaux modernes à Courbevoie. Au Salon de l'Auto, Corre-La Licorne présente une 5 CV tourisme, à moteur 4 cylindres à soupapes latérales, de 903 cm3. Cette HO2 est destinée à prendre la place de la 5 CV Citroën, mais elle doit lutter contre les Rosengart et la Peugeot 190 S, avant la redoutable 201 de 1929. Petite voiture, conçue par les ingénieurs maison, elle investit un créneau quelque peu délaissé par la concurrence et deviendra le plus populaire des modèles La Licorne. Le succès est immédiat et l'année suivante, une version évolutive avec châssis allongé et surélevé permet de carrosser le HO2 en laissant libre cours à son imagination. La plupart des carrossiers exercent alors leur talent sur le modèle et de nombreux prix viennent récompenser les différentes versions dans de nombreux concours d'élégance. Que ce soit coaches Deauville, Biarritz, La Baule ou Familia, les cabriolets Fémina ou Riviera ou encore le torpédo sport, chaque version est une réussite, tant esthétique que technique.
Dans la gamme, les utilitaires ne sont pas oubliés, car une commerciale vient également compléter l'offre, perpétuant ainsi la vocation de la firme dans le domaine des camionnettes et camions de 500 kg à 3 tonnes.

La Licorne

D'un strict point de vue technique, la maison La Licorne au début des années trente s'adonne à des solutions éprouvées, sinon grandement dépassées, à l'instar des mécaniques aux soupapes latérales et du dispositif de suspensions avant et arrière à essieu rigide comprenant des ressorts longitudinaux à lames. Il s'agit de machines certes de taille modeste, mais bien construites, d'une certaine élégance, bénéficiant d'une réputation flatteuse et de ce fait d'une clientèle fidèle.
En 1930, la marque devient simplement La Licorne, après une réorganisation qui fait appel au concours des agents et concessionnaires. La firme est devenue la première marque française en véhicules commerciaux et industriels grâce à son efficace et important réseau d'agents régionaux mis en place. La 5 CV devient une 5/7 CV, mais seule la dénomination change, la voiture ne subissant aucune modification. On enregistre la première conduite intérieure disponible en quatre portez et un nouveau cabriolet avec spider appelé Week-End. Les bons résultats commerciaux sont soutenus par de bons résultats en course. Au Monte-Carlo 1930, une La Licorne, en version torpédo à deux portes et avec trois personnes a à bord, remporte le rallye à la surprise générale. En effet, face aux 142 concurrents apparemment mieux armés, on ne donnait pas cher de ses chances de victoire, la voiture rendant plusieurs dizaines de chevaux à ses adversaires. Pourtant, Hector Petit, Parti de Jassy en Roumanie, parcourt les 3.500 km en respectant la moyenne imposée de 40 km/h, ne récoltant au passage que 320,65 points de pénalisation. La voiture avait déjà relier la Roumanie avant le départ, ce qui fait un total de 7.000 km parcouru par la voiture. Cette performance sportive exceptionnelle lui vaut de rafler également la Coupe du Journal, la Coupe de Régularité, la Coupe de l'Illustration, et quelques autres. Ajoutons également la seconde place en catégorie de Vallon, un concessionnaire, au Bol d'Or à St Germain, en juin 1930, 6e au général avec une La Licorne Spéciale. L'année suivante, il remportera l'épreuve en catégorie, terminant 2e au général Ces victoires entretiennent la réputation de la marque, mais la concurrence des grandes marques devient plus redoutable. Cette publicité arrive à point et permet pour la marque d'affirmer la qualité du châssis 5 CV dans une période délicate puisque la France subit le contrecoup du crash de Wall Street du mois d'octobre 1929. C'est ce qui va permettre à La Licorne de passer sans trop de dommages la difficile crise de 1931/1932, alors que de nombreux constructeurs voient leur chiffre de ventes diminué, voire s'interrompre, certains devant cesser toutes activités. D'un autre côté, la 10 HP et les petits utilitaires participent à ce sauvetage en ce début des années trente.

En 1931, une nouvelle berline 4 portes 5 CV baptisée Trianon et une nouveau châssis 6/8 CV type L04 arrive au catalogue. Extérieurement, ce dernier ne diffère que très peu de la 5 CV, tout à été cependant revu, du moteur (alésage augmenté, plus silencieux, etc.) aux petits détails qui font la différence. On trouve ainsi un coupe-batterie, qui n'équipe en général que les voitures haut de gamme, une lampe témoin sur le tableau de bord, ou l'utilisation massive du caoutchouc pour colmater tous les orifices et accroître d'autant le silence de la voiture. Comme sa devancière, la 6 CV se vend très bien, grâce notamment à son moteur silencieux et performant, et au chic de ses carrosseries dues principalement aux carrossiers Kelsch et Duval (Week-End, Opéra, Deauville) ou à la Société Industrielle Manessius (berline Trianon 4 places, 4 portes). Ces voitures participent également au Tour de France auto 1931 et, au terme de 15 jours d'épreuve et 5.000 km, le cabriolet Week-End et le coupé Opéra reçoivent la médaille d'or. Pendant que Vallon, metteur au point et pilote essayeur de la marque, termine premier à l'épreuve des Routes Pavées et second au Bol d'Or, au volant d'une 5 CV. Un podium renouvelé l'année suivante avec une seconde place au Bol d'Or 1932, ultime épreuve de vitesse à laquelle participent officiellement les voitures La Licorne.
L 610
Par leurs proportions agréables et équilibrées, les autos semblent séduire une clientèle principalement féminine. Les voitures La Licorne se situent en 1934 dans la catégorie fiscale moyenne des 6 et 8 CV et se présentent au sein d'un catalogue plutôt très complet pour une marque d'un rayonnement malgré tout modeste sur un strict plan national. La petite La Licorne Type L 610, facturée entre 13.000 et 16.450 francs, est une nouvelle 5 CV présentée à la fin de la saison 1933, dont la caisse est établie sur un châssis de 245 cm, animée d'un moteur à 4 cylindres aux soupapes latérales de 935 cm3 développant 20 chevaux. Le modèle est disponible en châssis nu, en berline deux portes pompeusement baptisée Biarritz, en coupé deux/trois places ou deux places seulement. Les machines sont livrées sans pare-chocs ni enjoliveurs de roues, d'où une certaine austérité. Heureusement, le reste de la carrosserie, avec notamment la calandre verticale chromée bien dessinée, dégage une belle prestance. Les flancs de capot accueillent deux groupes de sept fentes d'aération horizontales.
L 04
L'offre Type L 04, basée sur un châssis de 260 cm d'empattement, est équipée d'une mécanique 6 CV de 1.125 cm3 donnant 25 chevaux. En plus du coupé Biarritz, déjà mentionné dans la gamme L 610, on peut commander une berline Rivoli, une conduite intérieure Trianon ou un coach Provence. Les prix des modèles L 04 s'étalent de 17.950 à 24.000 francs.

La Licorne Cabriolet 6/8 CV Antem, mis en production en 1935 sous la dénomination usine de Femina

L 750 et L 764
Si les séries haut de gamme du constructeur désignées L 750 et L 764 s'inscrivent dans une puissance fiscale de 8 CV, elles conservent un obsolète groupe à 4 cylindres en ligne aux soupapes latérales. Seul avantage probant, la cylindrée de ce dernier est portée à 1.450 cm3. Une puissance de 34 ch à 3.500 tr/mn est alors disponible. Les La Licorne type L 750, vendues entre 20.900 et 25.000 francs, reposent sur une plate-forme de 260 cm d'empattement et reprennent les dénominations maison, Rivoli, Trianon et coach Provence. Les voitures du catalogue L 764 cachent sous leur capot un 4 cylindres en ligne identique mais bénéficient d'une boîte de vitesses à 4 rapports. Elles sont par ailleurs construites sur un châssis de 275 cm d'empattement et se déclinent sous des propositions différentes des "soeurs" d'usine. On découvre trois configurations berline, Longchamp, Opéra et Sical, plus un coach Deauville et un roadster deux places. Les bons de commandes indiquent des sommes allant de 27.000 à 27.500 francs. Les côtés de capot de La Licorne L 750 et L-764 accueillent des volets au lieu de fentes comme sur les types L 610 et l 04, mais conservent comme ces dernières des freins mécaniques à câble, ce qui est déjà considéré en 1934 comme un vrai retard technique.
L 760 et LRW
La marque, pour mieux lutter contre la crise, met l'accent sur ses nouvelles 6/8 CV, qu'elle présente dans les concours d'élégance sous de très jolies caisses signées par les meilleurs carrossiers, avant d'introduire de nouveaux modèles pour 1936. En attendant, deux nouveaux modèles de tourisme sont proposés, deux 8 CV référencés L 760 et LRW. Elles se distinguent par une boîte à 3 rapports et des freins sur les quatre roues. La version "Normandie" suit, une version conduite intérieure très sommaire.

La Licorne Type L760 1934
La 5 CV disparaît en 1933, mais refera surface en 1934, avec un radiateur légèrement incliné vers l'arrière pour s'adapter à la mode de l'époque. En 1935, de nouveaux moteurs à culbuteurs avec vilebrequins sur trois paliers équipent une gamme entièrement remaniée. Cette gamme est renforcée par une 10 CV, puis une nouvelle 11 CV engagée au Tour de France Auto. Elle s'illustre à son tour, remportant une médaille d'or après avoir effectué les 5.000 km de l'épreuve sans la moindre pénalié. Au Salon de Paris, La Licorne présente un nouveau modèle, une 14 CV 4 cylindres qui s'attaque au marché des voitures de grand luxe. Un nouveau cabriolet Victoria apparaît, sur châssis 10/11 CV, pour être commercialisé en 1936. Ce modèle est doté de roues avant indépendantes, généralisées désormais sur l'ensemble de la gamme, tout comme les quatre silentblocs verticaux sur lesquels repose le moteur, puis la boîte quatre vitesses à partir de 1937. Ces perfectionnements traduisent parfaitement les engagements pris par la marque depuis ses débuts, à savoir qu'une voiture ne se conçoit pas sans progrès, une phrase que l'on retrouve fréquemment dans les publicités de l'époque.

Elégance

C'est au cours du concours d'élégance organisé entre les mois de juin et juillet 1934 dans le cadre prestigieux du parc de Bagatelle au bois de Boulogne que la firme de Courbevoie dévoile des modèles qui préfigurent grandement ceux du millésime 1935. La face avant des autos est enjolivée d'une calandre plus opulente, subtilement inclinée suivant la mode aérodynamique du moment, un montage qui sera retenu pour la saison suivante. Le très élégant cabriolet, dont la caisse signée des Etablissements Antem et construite sur un châssis 6/8 CV obtient le prix d'honneur du concours "Femina-L'Intran", rejoint le catalogue officiel La Licorne de 1935 sous le nom logique de Femina. Un coach quatre places sur un châssis 6/8 CV, une création du carrossier Duval, se pare d'une carrosserie étirée vers l'arrière, selon les critères aérodynamique déjà évoqués. Il est récompensé en ce même été 1934 par le premier prix du concours d'élégance de Bagatelle. Hélas, ce modèle ne connaîtra pas une production en série.

Juin 1935 au bois de Boulogne, une belle série de cabriolets prêts pour un concours d'élégance

Citroën

A la fin de l'année 1936, les dirigeants de La Licorne décident de faire appel à Citroën, afin d'habiller la conduite intérieure Rivoli. Cette décision est surprenante, car les voitures de la marque, bien que classiques, ont toujours été carrossées avec goût par des carrossiers sérieux et parfois illustres, comme Duval, Antem ou Autobineau. On se demande alors pourquoi avoir choisi Citroën, d'autant que la coque de la Traction Avant peut se passer de châssis et qu'il a fallu rallonger celui de La licorne. Les deux voitures, si elles se ressemblent au premier coup d'oeil, présentent quelques différences. La plus flagrante est la calandre, plate comme d'habitude sur le modèles La Licorne. De côté, on remarque le marchepied, maintenu sur le modèle et supprimé sur la Traction Citroën. De plus, la Rivoli s'avère plus luxueuse, plus silencieuse, grâce aux joints épais entre el châssis et la coque. La 11 CV La Licorne n'aura cependant pas le succès de son homologue à chevrons.

    

La Licorne Rivoli
Le partenariat entre La Licorne et Citroën se poursuit avec la sortie du coach 6/8 CV de 1938, disponible en deux motorisations, avec le moteur maison 6/8 CV de 1,1 litre de cylindrée avec une boîte quatre vitesses ou le moteur 7/9 CV de 1,6 litre de la Traction avant Citroën, avec une boîte à trois ou quatre rapports. Ce nouveau châssis, à tube central ((rigidité accentuée de la plate-forme porteuse), est habillé d'une caisse identique tout acier dont l'aérodynamisme a été plus étudié que sur les carrosseries précédentes. Il se caractérise par des roues avant indépendantes, des amortisseurs hydrauliques progressifs et un original essuie-glace central unique qui sera repris quelques années plus tard par Citroën. L'équipement intérieur comporte également certains éléments de la Traction Citroën comme par exemple le tableau de bord. Les deux modèles ne manquent pas de charme ni de qualités, mais leur diffusion demeure assez limitée. Par la suite, la firme étudiera la possibilité d'adapter le moteur 1,9 litre de la Traction 11 légère Citroën sur sa nouvelle 11 CV type A194, mais ce projet ne dépassera jamais le stade du prototype.
A la fin des années trente, la plus prolifique pour la marque puisqu'elle a vendu environ 25.000 véhicules, la guerre interrompt une fois encore ses activités. La Licorne s'associe alors avec la société Mildé-Krieger, spécialisée dans les voitures électriques. La 6/8 CV est équipée d'un moteur électrique et sera commercialisée par Mildé-Krieger (type AEK) et par Aéric (type AEA). ces moteurs sont activés grâce à 48 batteries Tudor, réparties à l'avant et à l'arrière de la voiture, lui permettent d'atteindre les ... 40 km/h.
Sous la pression de plusieurs membres de sa famille, ruinés par l'effondrement du marché du textile, Lestienne est contraint de vendre sa société en 1942. Il reste cependant actionnaire, sans être majoritaire. Ettore Bugatti, qui pressent qu'il aura des difficultés pour récupérer son usine de Molsheim, alors réquisitionnée par les Allemands, s'en porte acquéreur, pour finalement la revendre, à la fin de l'année 1946 à la famille Lebon, propriétaire d'importantes usines... à gaz. Le siège de la Licorne est une nouvelle fois transféré, dans les locaux de l'E.U.S.D. (Emboutissage et Usines de Saint-Denis), sur les quais de Seine à Saint-Denis.
En 1946, à la reprise de la production, la société La Licorne est tout simplement "oubliée" par le plan Pons chargé de distribuer les ressources et approvisionnements encore disponibles en France. Une décision d'autant plus injuste qu'elle est suivie par celle de la direction de Citroën de suspendre la fourniture des moteurs de la Traction. D'où la nécessité de ressortir l'ancien moteur maison 8 CV à soupapes latérales pour animer le nouveau coach 8 CV type 164 LR présenté au salon 1946. Malgré quelques améliorations, cette voiture ne parvient pas à s'imposer, car trop désuète, et met un terme à la production d'automobiles. Dans un dernier sursaut, la marque fabrique des fourgons 1.000 kg, camionnettes et tracteurs à chenilles sous licence Mommendey. Et ultime illusion, le prototype d'une 14 CV décapotable est présenté au salon de Paris en 1948. Un projet sans lendemain. Deux ans plus tard, les usines La Licorne ferment définitivement leurs portes après avoir produit un peu plus de 40.000 véhicules. Et d'être reprises par Berliet.