HELICA    

Dernière mise à jour : 30/05/2010

L'avion de la route

Petit historique

Marcel Leyat (1885/1986)

Un des plus vieux rêves de l'homme est sans doute de voler comme les oiseaux. Au début du siècle, les frères Wright réussirent cet exploit à bord d'un aéroplane équipé de deux hélices, ce qui ne manqua pas d'inspirer de nombreux chercheurs amateurs. A une époque ou l'aviation n'en est encore qu'à ses balbutiements, un ingénieur à l'idée de mettre une hélice sur une voiture: l'Hélica. Malheureusement, ce concept original naura pas le succès escompté par son concepteur, Marcel Leyat.
Marcel Leyat est né dans la Drôme, à Die, en 1885. En 1908, alors qu'il est élève de l'Ecole Centrale, il s'élance du haut d'une colline, suspendu sous un gros cerf-volant de sa fabrication, comme de nos jours le font les parapentistes. Il décolla, mais son vol fut de courte durée. Il recommença le lendemain, et les jours suivants, réalisant des vols planés de plus en plus conséquents. Il n'avait alors que 19 ans. Après des études à l'Ecole des arts et manufactures de Paris (devenue Ecole Centrale en 1907), il devient ingénieur en 1911. Auparavant, en 1909, il avait construit son premier planeur destiné à être lancé au treuil. En 1913, il se consacre à la réalisation de sa première voiture à hélice, baptisée l'Hélicocycle. Le début de la Grande guerre l'empêchera de commercialiser son invention. Orienté vers la section technique de l'aviation, sa grande connaissance des hélices lui fut très utile. Il proposera aux autorités militaires de l'utiliser comme véhicule de liaison. Ce projet n'aboutira pas, mais le brevet de l'automobile à hélice sera finalement déposé à la fin de la guerre.

Engin hybride

L'idée de mettre une hélice à un véhicule terrestre s'imposa vite. On rencontre ainsi, dans l'histoire de la locomotion, nombre de véhicules équipés d'hélices : des trains, des traîneaux, les premiers hydroglisseurs, des bateaux, des bicyclettes, des motos et des voitures. Marcel Leyat caressait un rêve, largement partagé encore aujourd'hui, et que l'industrie mondiale n'a toujours pas réalisé : produire une voiture automobile qui se transforme en un instant en avion, afin de pouvoir, avec le même engin, rouler sur la route et voler dans les airs. Rectification : la société américaine Terrafugia pourrait commercialiser le premier modèle de véhicule volant en 2009-2010. Baptisée Transition, elle pourrait parcourir 800 kilomètres d'une traite à plus de 185 km/h.

Dès 1919, Marcel Leyat travaille à une nouvelle version de sa voiture à hélice. Il en fabriquera six dès 1920. En 1921, il réalise un nouveau modèle qui sera produit à dix exemplaires. Trois versions sport sortiront la même année. L'idée de Leyat se doublait d'une directive importante : mettre cet engin de rêve à portée de toutes les bourses, ou presque. La voiture Hélica, présentée en 1921, répondait en partie seulement à ce projet : elle était en quelque sorte un avion de la route. Elle avait été construite dans une modeste usine à Paris, 27 quai de Grenelle. La carrosserie, qui se présentait comme le fuselage des avions de l'époque, était composée de longerons en bois sur lesquels étaient assemblés des éléments de contreplaqué. La voiture ne comportait que deux places en tandem, et derrière le passager se trouvait un petit coffre à bagages. L'une des particularités de l'Hélica résidait dans ses roues avant, qui étaient fixes, la direction de l'engin étant commandée par un câble relié aux deux roues arrière, ce qui n'était pas sans donner à l'Hélica une douceur et une précision de conduite exceptionnelles, si l'on en croit les utilisateurs de l'époque.

A l'avant, son hélice tractive de fort diamètre était entourée d'un grillage de protection, laissant passer l'air mais pas les mains des enfants... ou des adultes. Immédiatement derrière l'hélice se trouvait le moteur de moto ABC, l'un des premiers bicylindres à plat commercialisé par la firme anglaise du même nom. Ce moteur tournait à 1.800 tr/mn au maximum de sa puissance, et la mise en marche s'effectuait par une manivelle qui déroulait un câble, entraînant les premiers tours du moteur. L'hélice mesurait 1,39 m de diamètre et pouvait être à 6 ou 4 pales. Les freins à tambours agissaient sur les roues avant, mais, caractéristique surprenante, les deux freins étaient indépendants. Le pied droit agissait sur le frein de la roue droite et le pied gauche, bien sûr, sur la roue gauche. Pour Marcel Leyat, L'Hélica n'était q'une étape vers son rêve de voiture-avion.

L'Hélica dans sa version berline
Dès la sortie de son Hélica, Marcel Leyat reçut 600 commandes provenant du monde entier. Parmi les acheteurs, le roi d'Espagne Alphonse XIII et bien d'autres personnalités de l'époque, avides de "nouveautés". Mais les Hélica ne seront jamais construites en grande série.
Peu de constructeurs ont tenté de réaliser ce type de véhicules. Nombreux sont resté à l'état de prototype. Leyat semble être le seul a avoir produit en série et commercialisé ce type d'automobile. Sur les 23 exemplaires construits (chiffre le plus souvent rencontré), deux exemplaires sont encore en vie, l'un au musée du CNAM à Paris, l'autre appartenant à un collectionneur privé.
En 1922, Leyat transféra ses ateliers à Meursault, sur les conseils du notaire Carmaniolle qui lui a réalisé un montage financier. Jusqu'en 1946, il se consacrera surtout à l'aviation et travaillera sous contrat avec le ministère de la Guerre. Les entreprises de Meursault et de la région sont bien sûr associées à ses travaux. Durant cette période, Leyat concevra « l'incapotable », un avion à ailes mobiles, une draisine à hélice pouvant rouler sur rails et sur route, une Hélica volante à 3 places, une avionnette à ailes mobiles qui effectuera des vols sur le terrain de Beaune... En 1927, il établira même un record de vitesse sur l'anneau de Montlhéry en roulant à 170 km/h avec une voiture à hélice !