
AUBURN

Dernière mise à jour : 12/05/2010
Audace et vitesse

Petit historique
Charles Eckhart (1841–1915)

Franck, Morris et William Eckhart
Charles Eckhart, charron, exerce ses talents au sein des célèbres ateliers des frères Studebaker,
à South Bend dans l'Indiana. Il décide ensuite de
s'installer à Auburn, pour fonder, en 1874, la Eckhart Carriage Company pour construire ses propres voitures hippomobiles. En 1893, il laisse ses trois
fils reprendre son affaire. Ces derniers ont fait leurs leur apprentissages dans des maisons spécialisées dans la fabrication de voitures, devenant
respectivement peintre, ajusteur et sellier. Ce sont Franck et Morris, fascinés par les nouvelles machines que l'on nomme "voitures sans chevaux" qui
franchissent le pas décisif en assemblant en 1900 un engin doté d'un moteur monocylindre. L'Auburn Automobile Company est née.
Les premières créations
sont des buggy dotées d'un moteur monocylindre vendus d'abord sous le nom d'Eckhart. Ce n'est que le 22 août 1903 qu'est fondée la Auburn Company,
avec un nouveau modèle vendu à une centaine d'exemplaires, l'Auburn 6 HP. En 1906, la firme passe au bicylindre avec la Model A. Il sera produit
jusqu'en 1910. Le second modèle de la marque, le Model G, est une voiture à moteur quatre cylindres Rutenber disponible en découvrable ou en camionnettes.
En 1912 apparaît la première 6 cylindres, la Auburn 6/50 à moteur Rutenber de 41 CV. L'Auburn 33 4 cylindres en torpédo suit en 1913, puis la 6/45 en 1914.
A partir de 1916, les trois modèles au catalogue, la 4/38 à moteur 4 cylindres Rutenber, la 6/38 à moteur 6 cylindres Teetor et la 6/40 à moteur
6 cylindres Continental se vendent mal et la firme stoppe la production en 1918.

William Wrigley Jr (18861/1932)

C'est William Wrigley Jr qui rachète la firme Auburn. Wrigley est à la tête d'une entreprise qui produit les célèbres chewing-gum du
même nom. Il réorganise la société qui dépend désormais du groupe R Band de Chicago. Il conserve Morris Eckhart comme PDG et la première voiture
à sortir est la Auburn Beauty Six, dotée d'un moteur Continental Red Seal. 15.717 exemplaires seront produits jusqu'en 1922.
Erret Lobban Cord (1894/1974)

En 1924, la production d'Auburn tourne autour de la Beauty Six et ne produit plus que six voitures par semaine. La qualité de construction n'est pas
en cause, mais le stylisme vieillot décourage la clientèle. Résultat : plus de 700 modèles "dorment" dans la cour de l'usine. C'est à ce moment critique
qu'intervient l'homme providentiel, alors âgé de 30 ans, qui fera bientôt figure de légende dans le microcosme automobile américain.
L'arrivée de Cord, qui est parvenu à convaincre les dirigeants de R. Band, va tout changer. Lorsqu'il reprend la firme Auburn en main, Cord en est déjà
à sa troisième faillite. Il s'est remis en selle en prenant un poste de vendeur chez Moon Automobiles, avec environ 30.000 dollars annuels de commissions.
Un nouveau défi l'attend. Erret Loban Cord est donc nommé président de l'Auburn Co. en 1924. Le salaire est modeste mais son contrat stipule un accès
privilégié au capital de l'entreprise, si ses idées pour sauver la firme de ce mauvais pas s'avèrent payantes. En gros, si Cord parvient à sauver
l'entreprise, les propriétaires devront accepter de lui vendre l'entreprise. Cord estime que le devenir d'Auburn passe par une image de marque liée à
la performance et des lignes modernes et originales.
Si Ford disait : "Tout le monde peut choisir la couleur de sa Ford, pourvu qu'elle soit noire", Cord, lui, décide de faire repeindre les Auburn encore
en stock en couleurs variées. Il rajeunit la gamme en adoptant le deux tons. Un an plus tard, la firme est à nouveau florissante. En 1925, il rachète R. Band
et devient le nouveau propriétaire d'Auburn.
8-88 et 8-115 Speedster
Les ventes sont doublées et Cord engage l'ingénieur James Crawford pour étudier un 8 cylindres.
En 1927, en plus d'un 6 cylindres en ligne, celui de la série 6-66 (68 ch), la gamme 8-88 se dote d'un 8 cylindres en ligne Lycoming développant 88 ch.
Afin de tester ces nouvelles dispositions sportives, le pilote Wade Morton est nommé chef essayeur officiel de la maison. En janvier 1928, le catalogue Auburn
s'étoffe et comprend désormais une gamme 6 cylindres, avec le type 6-66 A (66 ch) et le type 76 (60 ch), et trois modèles équipés de mécaniques 8 cylindres,
le type 8-77 (77 ch), les types DL8-88 et 88 (88 ch). Enfin, pour les amateurs de sensations fortes, la version 8-115, qui comme le chiffre l'indique, développe
la puissance respectable de 115 ch. Impressionnante en effet, car, pour mémoire, en 1928, la plus "musclée" des Buick ne dépasse pas les 77 ch, même la
luxueuse Cadillac n'a que 90 ch. De plus, les automobiles Auburn bénéficient d'un dispositif de freinage hydraulique, un système efficient que les marques
précitées de la General Motors attendront encore huit années avant de pouvoir exploiter ! Ces châssis ainsi vitaminés s'avèrent être une base idéale pour une
des carrosseries les plus spectaculaires des années trente, la configuration Speedster.

En octobre 1926, Cord rachète également Duesenberg. Une autre aventure pour Cord qui poursuit son travail au sein d'Auburn. Chez Auburn, d'ailleurs, la
version Speedster est un grand succès. Les exportations passe de 1.000 voitures en 1926 à 2.000 en 1927. Si la paternité des lignes du modèle Speedster deux
places demeure encore aujourd'hui confuse, attribuée à la fois au créateur indépendant Alexis de Sakhnoffsky et au talentueux styliste du groupe Auburn-Cord,
Al Leamy, les formes de l'auto sont une réussite éclatante. Derrière la nouvelle calandre divisée en son milieu et le long capot sur lequel démarre le
travail de peinture en deux teintes se trouve le pare-brise en forme de V, en position inclinée, ce qui donne à la machine une impression de vitesse même
à l'arrêt. Les fentes latérales de capot, placées en quatre groupes, sont elles aussi penchées afin d'accentuer cette même sensation. Mais, bien sûr, la
partie magistrale de l'Auburn Speedster reste le dessin de la surface arrière : la caisse semble s'éloigner inexorablement des ailes, pour se terminer en
pointe acérée. L'habitabilité est réduite, la place en faveur des bagages mesurée, mais l'allure générale magnifique remplit de bonheur E. L. Cord. Cette
carrosserie Speedster est montée sur le châssis 8-88 (empattement : 318 cm) et, bien entendu, le modèle phare 8-115 (empattement : 330 cm).
En 1929, Auburn vend plus de 23.500 voitures, lorsque Cord fonde la Cord Corporation. En 1931, on estime la production à 34.228 unités. Malheureusement,
la crise économique fera chuter les ventes à 13.700 voitures en 1931.

Si, pour la saison 1929, l'Auburn Speedster ne change pas de robe, elle adopte des désignations différentes : le type 8-90 donne désormais 96 ch et la série
haute 8-120 développe 125 ch. En 1931, l'impressionnant Speedster demeure au catalogue Auburn, mais doté d'un tout nouveau dessin de calandre et de capot, une
nouvelle génération en somme, celle de 1931-1933. La configuration Speedster prend fin en même temps que la marque Auburn, avec les fabuleux modèles 8-851 SC
et 8-852 SC, à la mécanique munie sur demande d'un compresseur, des ultimes versions présentées respectivement en 1935 et 1936.
12-160
En 1931, Cord décide de ne plus fabriquer les 6 cylindres et la 8/125. Tout sera misé sur la 8/98. Elle sera disponible en deux séries, la Special et la Standard,
déclinées toutes les deux en sept déclinaisons. En 1932, Cord introduit un V12 Lycoming de 160 ch, proposant au catalogue un nouveau modèle, la 12-160.
Avec le Coupé, c'est la 12 cylindres la plus économique du moment. Cependant, cette gamme sera un échec.

Alors que l'année 1932 représente pour les Etats-Unis la pire période de la grande dépression économique, c'est à cette époque que nombre de constructeurs
dévoilent des machines dispendieuses aux mécaniques multicylindres. Autre paradoxe, en 1931, la marque Auburn enregistre un excellent exercice commercial et
dégage un bénéfice de 3,5 millions de dollars. Alors que la plupart de ses confrères rognent sur les dépenses, un optimisme un peu surréaliste règne à Auburn,
siège de l'entreprise depuis 1930. Grisée par cette performance financière et encouragée par ses confrères Packard, Lincoln, Franklin, Pierce-Arrow et Cadillac,
qui dévoilent en 1932 des mécaniques à 12 cylindres en V, Auburn s'intègrent dans ce cercle fermé en présentant les séries 161 Standard 12, 161 A Custom 12 et
165 Salon 12. Sous l'interminable et élégant capot repose donc un V12 de 6.413 cm3 ouvert à 45°, laissant s'épanouir 160 ch, un argument de poids, alors que
les automobiles de la concurrence dans cette fourchette de prix dépassent rarement une puissance de 90 ch. Des spécialistes de la marque précisent qu'avec un
rapport de pont modifié et un régime moteur porté à 4.000 tr/mn, la mécanique est capable de cracher 207 ch, un chiffre réellement impressionnant en 1932. Cette
belle pièce de fonderie pèse un poids respectable, 498 kg, et provient de la maison Lycoming, une des filiales spécialisées du groupe Auburn Cord Duesenberg.
Particularité de l'architecture moteur, les soupapes sont montées horizontalement.

V12 Cabriolet 4 portes 1932
Les automobiles Auburn à 12 cylindres reposent sur un châssis en X de 335 cm, contre 332 cm pour les 8 cylindres, et pèsent 300 kg de plus. Le freinage est
assuré par un moderne dispositif hydraulique Lockheed et un système de lubrification du châssis de marque bijur est monté systématiquement sur les voitures.
L'Auburn Twelve partage les mêmes six configurations de carrosseries que sa soeur à 8 cylindres, soit un coupé, le type Brougham (une caisse deux portes,
cinq places), une berline, un cabriolet, une torpédo et enfin le magnifique Speedster à la pointe arrière effilée. Toutes ces caisses sont signées par le
prolifique styliste maison Al Leamy. Mais la situation économique du pays ne cesse de se dégrader. Malgré son habituel optimiste démesuré, Erret Lobban Cord
doit annoncer des ventes en retrait de 60 %. Durant l'exercice 1932, la compagnie perd un million de dollars et, pour la première fois depuis 1925, aucun
dividende n'est distribué aux actionnaires. Une nouvelle série, disponible en motorisation 8 ou 12 cylindres, baptisée Salon, est ajoutée au catalogue 1933.
La finition s'avère encore plus soignée que sur les version Custom, déjà de grande qualité.

La reine de beauté Lita Ray, à côté d'une Auburn 12 160A V12 1932 Speedster
Malgré le retour d'une gamme équipée d'un 6 cylindres en ligne plus économique (85 ch à 3.500 tr/mn) dès la saison 1934, la santé financière de la firme de
l'Indiana se détériore rapidement et la confiance quitte une clientèle déjà trop rare. Les ultimes Auburn Twelve sont écoulées durant l'année 1934. Même la
très intéressante refonte stylistique opérée par Gordon Buehrig en faveur de la gamme 1935-1936 n'y fait rien, la dernière automobile Auburn livrée est un
millésime 1936. L'échec de l'Auburn Twelve résulte davantage d'une naissance malchanceuse au sein d'un climat commercial exécrable qu'à un quelconque défaut
de conception. De plus, ces luxueuses automobiles remarquablement fabriquées et équipées s'avèrent être, face aux autres compétiteurs de la classe V12, de
formidables opportunités par leurs prix de vente modestes, situés entre 1.145 et 1.845 $. Mais, curieusement, la vie du 12 cylindres en V Auburn ne s'arrête
pas en 1934. Une autre destinée, encore plus utile, s'offre à lui. Avec une cylindrée portée à 8.624 cm3, la belle mécanique trouve place dans la salle des
machines des puissants véhicules d'incendie American La France, et ce jusqu'au début des années soixante.

12-160 Boattail Speedster 1933
Ixo
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Malgré un côté très chic, sportif et élégant, l'Auburn n'a pas la même "classe" et le même renom que ses soeurs du groupe : Cord et Duesenberg. Si ces deux
marques visaient une clientèle aisée, l'Auburn était plutôt destinée aux classes moyennes.
Les capacités sportives de l'Auburn Twelve furent immédiatement mises en valeur par l'obtention de 37 records de vitesse pour automobile de série glanés
sur le lac asséché de Muroc, en Californie. Certains de ces records seront encore en vigueur après la Seconde Guerre mondiale.
851
En 1934, Auburn revient donc au 6 cylindres avec la 652 et au 8 cylindres avec la 850.
Le 8 cylindres peut être doté d'un compresseur "Supercharged". Ce dernier permet d'obtenir une
puissance de 150 ch. (115 sans le compresseur), presque autant que le V12 précédent. Mais Erret Lobban Cord fuit
en Angleterre. Certains diront qu'il a préféré s'enfuir après l'affaire Lindbergh, pour éviter le rapt de ses enfants. D'autres
disent que Cord a voulu échapper au fisc. Malgré ce départ inattendu, la firme poursuit sa production, avec des modèles rebaptisés
851 et 653. Dans le même temps, un véhicule est mis au point par HT Ames, Gordon Buehrig et A. Duesenberg, l'Auburn Speedster 8/51,
disponible avec ou sans compresseur. Beaucoup d'éléments des carrosseries des 12 cylindres invendues furent utilisés pour ce
modèle.

851 Supercharged Speedster 1935
Matchbox
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Gordon Miller Buehrig (1904/1990)

Avant d'intégrer la firme d'Erret Lobban Cord, Gordon Buehrig travailla au sein des studios de la Général Motors. C'est en 1929 que le président de la
société Duesenberg l'engage pour dessiner les carrosseries des Duesenberg Type J. Il ira ensuite réaliser les carrosseries impressionnantes des Auburn 851 de 1935.
Arrivé chez Cord en 1933, il travailla dans un premier temps sur l'Auburn "Supercharged" Speedster de 1934, qui reste l'un des grands classiques de l'Automobile du
20e siècle, à tel point que des artisans en fabriquèrent beaucoup plus tard des répliques. Malheureusement, les magnifiques Auburn "Supercharged" furent le chant
du cygne de la marque : 500 exemplaires seulement furent fabriqués de 1934 à 1936. La firme Auburn disparut en 1936, un an avant l'effondrement de Cord et Duesenberg.
Fin d'une marque
La 852 est due à deux hommes venus de chez Duesenberg. Appelés pour moderniser la gamme Auburn, Gordon Buehrig et
August Duesenberg vont profiler la 851 et la 852. Sous le capot, et sur certaines voitures de la gamme,
c'est Kurt Beier qui "boostera" le moteur avec un compresseur de la société Schwister-Cummins. On trouvera donc dans la
gamme des Custom Eight, Salon Eight atmosphérique et Supercharged Eight. Toutes ces voitures seront travaillées avec le même
soin.
En 1936, la 851 devient 852, mais les ventes se tassent et la production cesse. Le nombre de Speedster
851 et 852 produits dépasse tout juste les 500 exemplaires.
En 1935, aux mains du pilote Ab Jenkins, l'Auburn Speedster devint la première voiture américaine
de série à franchir la barre des 160 km/h pendant plus de 12 heures, à la vitesse moyenne de 165,6 km/h.
Il établira un nouveau record sur le mile lancé, avec une vitesse de 167,64 km/h. C'est ainsi que chaque Speedster
disposera vendu sera muni d'une plaque signée par le pilote lui-même, garantissant qu'il a été testé et
essayé à 160 km/h.
En 1936, Auburn ne produit que 4.830 véhicules. L'année suivante, Cord revend ses actions de la Auburn Automobile Company et c'est
un nouvel actionnaire majoritaire qui reprend l'entreprise. Ce nouvel actionnaire annoncera rapidement qu'il renonce à la production d'automobiles
au profit de pièces pour des conditionneurs d'air. La firme disparaît donc un an avant l'effondrement de Cord et Duesenberg.

