LA COMPETITION AUTOMOBILE     

Dernière mise à jour : 18/05/2010

    Louis Chiron (1899/1979)    

Une seule passion, la vitesse...

chiron

Louis Alexandre Chiron est né le 3 août 1899 à Monaco. Dans les années 20 et 30, il deviendra "le" pilote français par excellence, remportant de nombreuses victoires de premier plan. Mais avant cela, revenons à ses débuts.
En 1917, Louis Chiron s'engage comme volontaire et devient chauffeur d'état-major. Une fois la guerre terminée, Louis retourne à Monaco et trouve un emploi à l'hôtel de Paris. Là, il a l'occasion de conduire les plus belles voitures du monde, dont celles qui participent au célèbre Rallye de Monte-Carlo. Louis, qui fréquente les jeunes et riches sportifs, commence à prendre goût au pilotage. En 1923, il remporte la course de côte de La Turbie, au volant d'une fabuleuse Bugatti Brescia empruntée pour l'occasion. Durant cette année, et celle de 1924, Louis va confirmer cette prestations en multipliant les succès dans des épreuves locales, toujours avec une Brescia. En 1925, il participe au GP de la Côte d'Azur et se classe 2e. Son nom commence à attirer l'intérêt. Ce n'est pourtant que deux ans plus tard que Bugatti s'intéressera vraiment à lui. En attendant, Louis Chiron est sponsorisé par l'industriel Suisse Alfred Hoffman, propriétaire d'une écurie de course. Louis remporte le Grand Prix du Comminges à St Gaudens 1926 en Formule libre, puis, le 1er août 1926, se classe second dans sa catégorie dans le Grand Prix de Provence à Miramas le 28 mars de la même année et termine 4e au général. Puis, il se démène au Gran Premio de Milano, le 12 septembre à Monza, ne se classant que 4e à l'issue de l'épreuve qu'il fit une nouvelle fois au volant d'une Bugatti 35.

1927

chiron 1927

En 1927, Louis Chiron participant à une épreuve reliant Aix en Provence à Marseille. Il court cette fois sur Bugatti T35B.
Après une seconde place dans la Course de Formule Libre de l'ACF, à Monthléry le 2 juillet 1927, Louis Chiron file vers l'Espagne pour s'emparer de la 4e place du Gran Premio de San Sebastian, le 25 juillet. Ettore Bugatti, qui a remarqué le pilote au cours du grand Prix de Miramas de 1926, l'engage comme pilote de réserve. Le 31 juillet, il débute pour l'écurie au Grand Prix d'Espagne et relaie André Dubonnet. Il doit malheureusement abandonner au 36e tour suite à des problèmes mécaniques. En octobre, il affirme cependant lors du RAC Grand Prix, à Brooklands, en terminant 4e de l'épreuve, à sept tours cependant des imbattables Delage 1500 pilotées respectivement par Robert Benoist, Edmond Bourlier et Albert Divo, de futurs adversaires de poids à battre. Il devance cependant Emilio Materassi, l'autre pilote de la Bugatti 35A.

1928

En 1928, Louis Chiron est mis à la porte de l'écurie d'Alfred Hoffman. Ce dernier reproche au pilote d'être devenu un peu "trop intime" avec son épouse. Louis Chiron s'en va, sans regrets puisqu'il est désormais pilote officiel de l'écurie Bugatti... C'est à la Targa Florio que Louis entame sa saison 1928 avec la Bugatti 35C. Alors qu'il mène la course, il dérape à la fin du premier tour et perd beaucoup de temps. Il finit alors 4e de l'épreuve à 7 minutes du vainqueur, Albert Divo.
La plus grande déception vient du grand prix d'Allemagne, le 15 juillet 1928, une course endeuillée d'ailleurs par le décès de Viktor Junek lors du 4e tour. Sa Bugatti, qu'il partage avec sa femme Elisabeth, sort de piste après la montée qui mène à la courbe de l'Ex-Mûlhe (ancien moulin), appelée aujourd'hui "courbe Junek". Suite à cet accident fatal, Elisabeth Junek, l'une des premières femmes pilotes, abandonnera définitivement la course automobile.
Louis Chiron, sous une chaleur étouffante, fait une belle course en solitaire malgré une grande fatigue qui poussent d'ailleurs certains pilotes, et notamment les allemands (et le futur vainqueur) à se relayer pour arriver au terme de l'épreuve. Victime d'un problème de freins, chauffés au rouge, Louis devra se contenter de la 6e place. Certains affirment cependant que sans les relais effectués par les allemands Caracciola (le vainqueur), Werner, Walb et Rosenberg, Louis aurait terminé surement mieux placé, Otto Merz (sur Mercedes SS) et Gastone Brilli Peri (Sur Bugatti T35C) étant les deux pilotes devant lui à n'avoir pas eu recours au remplacement qui permit à quatre Mercedes de se placer en tête de l'épreuve. Seule la Bugatti de Gastone priva la firme allemande d'un quarté en se plaçant à la quatrième place.

Première victoire

Loin d'être contrarié, il remporte sa première victoire au Grand Prix de San Sebastian, et signe dans le même temps le record du tour à 142 km/h, battant Robert Benoist de plus de 2 minutes. Ce jour là, cependant, il n'y avait que des Bugatti au départ..... Le 29 juillet suivant, il remporte le Grand Prix d'Espagne à Lasarte mais sa plus grande victoire reste celle du 9 septembre à Monza. Lors de ce Grand Prix d'Italie, couplé avec le Grand Prix d'Europe, Louis Chiron s'impose avec panache après l'abandon de Bugatti 35 C de "W. Williams" devant deux italiens, Achille Varzi sur Alfa Romeo P2 (avec 2 minutes d'avance) et Tazio Nuvolari sur Bugatti 35C. La course est malheureusement endeuillée suite à l'accident fatal d'Emilio Materassi. Sa Talbot 700, catapulté dans la foule fera 22 victimes parmi les spectateurs.
Au cours de cette saison 1928, Louis remporta également d'autres victoires, le 1er Avril sur le Circuit de la Riviera, le 9 avril au GP d'Antibes Juan les Pins, le 10 juin au Premio Reale di Roma et le 5 juillet, au GP de la Marne.

Une claque au chancelier Hitler

Absent du Grand Prix de Monaco de 1929, on le retrouve également aux Etats-Unis à Indianapolis. Cette fois, il prend le volant d'une Delage 1500 qu'il mène à la 7e place de l'épreuve. Si les allemands avaient remporté le GP d'Allemagne en 1928, ce ne sera pas le cas cette saison. Louis Chiron va cette fois semer la pagaille sur les terres de Mercedes. Le 14 juillet, une bonne date pour les français, Louis est au départ de la célèbre épreuve sur le Circuit du Nürburgring. Les Mercedes SSK sont au départ, dont celle du grand Rudolf Caracciola. Les Maserati sont aussi au rendez-vous, comme Alfa Romeo, Talbot et Amilcar. On peut même compter sur une Renault, des DKW, des Fiat, des Impéria, des Hanomag et des Lombard, moins prestigieuse cependant que les précédentes citées. Les Bugatti 35 C, elles, sont prêtes à obtenir une revanche, confiées à Chiron, Bouriat et Philippe. Pendant ce temps, Adolf Hitler monte à bord de sa grosse Mercedes à conduite intérieure pour se rendre sur place, persuadé de la victoire d'un allemand.

Pendant les 4 premiers tours, Caracciola mène la danse, mais sa mécanique se casse et le contraint à l'abandon. Les autres Mercedes tentent de prendre le dessus mais ne peuvent rivaliser avec les Bugatti. Louis Chiron prend le commandement. Bouriat prendra la tête pendant quelques tours pendant le ravitaillement de son coéquipier mais Louis reviendra en tête très vite. Pendant ce temps, Adolf Hitler suit le déroulement de la course grâce à sa TSF installée dans sa voiture. A l'arrivée, Louis Chiron s'impose avec 12 minutes d'avance sur Philippe, et devance la première Mercedes de 14 minutes. Hitler, qui n'est pas encore au pouvoir, ne félicitera pas le vainqueur. Sentant le français et sa Bugatti sur le point de remporter le Grand Prix, il ordonna à son chauffeur de faire demi-tour.

Après cet exploit, qui ravira le peuple français, très chauvin à cette époque, Louis ira remporter le grand Prix d'Espagne, après une interminable course qui dura 6 heures. Chiron, reconnaissable désormais grâce à son foulard rouge à pois blancs, est parvenu au sommet de son art. Mais 1930 ne sera pas aussi festif.

1930

Si les Bugatti reste des voitures très compétitive, Louis Chiron va connaître une saison assez difficile. Pour commencer, il se fera battre chez lui, à Monaco, par un jeune pilote qui monte, René Dreyfus, qui ce jour là pilote une Bugatti 35 B privée. Il remportera toutefois le Grand Prix de Belgique et le Grand Prix de Lyon.
En 1930, Louis Chiron participe aussi à la Targa Florio sur une Bugatti 35B, mais doit s'incliner après un accident. Son co-pilote, malade, s'effondrant dans la voiture, Louis chercha à le retenir. Il perd alors le contrôle de sa voiture et percute un rocher qui brise deux de ses roues. Malgré une belle remontée, il finira deuxième.

chiron

1931

Malgré la pression de René Dreyfus, Louis parvient à remporter le Grand Prix de Monaco cette année. La Type 51, qu'Ettore a construit sur les conseils de son fils Jean, a tenu ses promesses. Cette voiture dispose d'un double arbre à cames en tête et quatre de ces nouvelles venues furent engagées dans le Grand Prix. Achille Varzi, Albert Divo, Guy Bouriat sont les pilotes de ces autres voitures. Il faut dire que la victoire de Bugatti n'est pas une surprise. En effet, sur les 23 voitures au départ de cette épreuve, seize sont de la marque de Molsheim ( 12 sont des voitures privées, principalement des T35 et T37). La plus grosse opposition viendra de la Maserati 8C 2500 de René Dreyfus, de celles de Fagioli et Biondetti. André Boillot, sur sa Peugeot 174 S tirera son épingle du jeu en terminant 6e. Quant à Rudolf Caracciola, sa grosse Mercedes SSKL ne sera d'aucune utilité sur le circuit tortueux de Monaco. Il abandonnera au 53e tour, embrayage cassé. A l'arrivée de Louis, 5 minutes avant les autres pilotes, Jean Bugatti, fou de joie, saute la murette des stands pour venir se jeter dans les bras de son pilote. Après un abandon au Grand Prix d'Italie, puis deux victoires au Grand Prix de l'ACF avec Varzi et au Grand Prix de Tchécoslovaquie, il se classe second du Grand Prix d'Allemagne (une pierre projetée lui cassa ses lunettes). Louis terminera la saison à la 7e place du championnat. On citera deux belles prestations à la Coppa Acerbo et la Coppa Ciano (2 fois second) pour conclure ce petit palmarès.

Louis Chiron au Mans

Louis participa à plusieurs éditions des 24 Heures du Mans, mais sans succès, n'en termina aucune. En 1928, c'est avec une Chrysler, puis, l'année suivante, avec une Stutz. En 1931, c'est avec une Bugatti 55 mais là encore, il ne pourra terminer l'épreuve malgré sa sagesse au volant. En 1932, il revient sur Bugatti puis, après une petite absente, revient avec Talbot en 1937, Delahaye en 1938, Ferrari en 1951 et enfin, Lancia en 1953.

chiron

Chiron au Mans en 1931 sur la Bugatti 55.

1932 - 1934

La saison 1932 fut assez décevante. Tazio Nuvolari, et son Alfa P3 fut pratiquement imbattable. Louis quitte alors Bugatti et fonde sa propre écurie avec Caracciola en achetant deux Alfa P3. A Monaco, en 1933, Caracciola se blesse lors des essais et Louis doit assurer la saison seul. Il remporte le GP de Tchécoslovaquie et le GP d'Espagne sur la P3 de la Scuderia Ferrari, qu'il a rejointe pour le GP d'Italie. Il doit cependant abandonner sur panne au GP de Belgique. Hors championnat, Louis remporte également les 24 Heures de Spa avec Chinetti et l'Alfa Romeo 2300.

En 1934, Louis, toujours chez Ferrari, se classe second du Grand Prix de Monaco, malgré le fait qu'il mena la course pendant 98 tours. Guy Moll termina la course devant lui, à 1 minute. Il devance toutefois René Dreyfus d'un tour. Au cours de la saison, il remporte encore le Circuit du Bordino, le Grand Prix de l'ACF, celui de Casablanca et le Grand Prix de la Marne. Par contre, il termine 3e à Tripoli, doit abandonner dans l'Avus et ne termine que 3e au GP de l'Eifel. Au Grand Prix d'Allemagne, il doit se contenter de la troisième place, derrière une Auto-Union et une Mercedes.

chiron

Louis et l'Alfa P3 de la Scudéria Ferrari.

1936 - 1939

En 1936, Louis signe avec Mercedes-Benz, aux côtés de Caracciola, Fagioli et von Brauchitsch et ce, jusqu'en 1939. Seul pilote français de l'écurie allemande, ses prestations ne seront malheureusement pas à la hauteur de sa réputation. Il ne gagnera aucun grand Prix avant la Seconde Guerre mondiale. En 1936, au Grand Prix d'Allemagne, louis est victime d'une sortie de route. A 250 km/h, sa voiture sort de la piste et se retourne, le blessant assez sérieusement. Il quitte alors Mercedes et ne reviendra en course qu'en 1937 avec Auto-Union, qui a déclassé les flèches d'argent. Mais Louis n'est plus au top et après quelques essais, Louis quittera les circuits et prendra une semi-retraite. En 1937 cependant, on le verra au volant d'une Talbot T150C 4 litres et remportera le Grand Prix de l'ACF en Formule Sport.

L'après guerre

En 1947, Louis revient sur les circuits au sein de l'Ecurie France. Il pilote alors une Talbot T150C monoplace centrale de 1939. Il court également pour la Scuderia Ambrosiana sur Maserati 4CLT. Il remporte alors le GP de l'ACF avec sa "vieille" Talbot, sa quatrième victoire dans cette épreuve. En 1948, alors que René Dreyfus a raccroché son casque, Louis retrouve Achille Varzi, vieil ami et rival. Les deux hommes se présentent au Grand Prix de Suisse. Vétérans, les jeunes pilotes engagés alors sont trop jeunes pour connaître les deux hommes. Malgré l'âge, les deux pilotes font encore des éclats. Malheureusement, alors que Louis suit Achille dans un virage qu'ils connaissent pourtant bien, l'italien contrôle mal sa voiture et suite à un contre-braquage, part à la faute. Achille percute les barricades de bois et c'est l'accident. Louis s'arrête alors pour secourir son ami mais il est trop tard. Alors que tous les pilotes portaient un vrai casque, l'italien n'avait qu'un simple serre-tête. Achille Varzi est mort sur le coup. Avec la mort de son ami, louis s'entoure d'un grand vide et se remémore les plus grands moments de sa vie, lorsqu'il remportait, avec ses copains, les plus belles courses de l'époque, sur les plus grands circuits d'Europe. Fagioli, Dreyfus, Caracciola, Nuvolari, Chinetti, Boillot, Divo et nombreux autres encore sont à la retraite ou disparus. Louis se retrouvent seul avec ses souvenirs. Pourtant, il ne renonce pas à la compétition, En 1949, c'est avec une nouvelle Talbot T26C qu'il remporte sa dernière victoire, au Grand Prix de France. Dans cette épreuve, il bat, à Reims, la Ferrari de Whitehead et la Maserati de Bira.
En 1950, avec sa Maserati, il réussit à se classer 3e à Monaco, derrière les fougueux et futurs champions Fangio et Ascari. Louis Chiron à 51 ans et les petits jeunes aux dents longues ont trop de hargne pour lui qui doit penser à poser son casque. Il termine cependant la saison en marquant quatre point de ce premier Championnat du Monde des Conducteurs.

chiron

A 56 ans, Louis (à droite avec son bonnet) est encore sur les circuits.

Final

Après avoir remporté, chez lui, le Rallye de Monte-Carlo sur Lancia Aurelia GT en 1954, Louis Chiron revient sur ce rallye en 1955. Au volant d'une Lancia D50 d'usine, des problèmes de sélecteur de vitesses ne lui permettront pas de s'imposer comme il l'avait fait l'année précédente. Il parviendra toutefois à placer sa voiture à la sixième place. A 56 ans, le "vieux renard", comme le surnommaient les allemands, fait encore une belle démonstration de son talent. Il disputera encore quelques épreuves, avec une Porsche 356. Il a alors 59 ans. Il abandonne le volant définitivement en 1958 mais ne quitte pas l'automobile pour autant. Nommé directeur de course du Grand Prix de Monaco, il assurera son poste pendant plusieurs années encore. Le 23 juin 1979, Louis s'éteint dans sa ville natale à 80 ans. Il restera l'homme en blazer et à l'incontournable foulard rouge à pois blancs, le pilote à l'incroyable carrière, longue et fertile.