
CES HOMMES QUI ONT FAIT L'AUTOMOBILE
Dernière mise à jour : 18/05/2010
Louis Heuliez
- 1903/1964

Le dernier carrossier français
La carrosserie française fut réputée pour sa créativité. Inadaptée aux nouvelles donnes industrielles et économiques de l'après-guerre,
elle finit par sombrer. Heuliez, lui, a sut répondre aux besoins industriels des constructeurs et reste le dernier représentant des carrossiers
français d'autrefois.
Dès la fin de la Première Guerre mondiale, les professions de carrossier et de charron se démarquent l'une de l'autre. Le travail du charron
tourne autour de la roue. A l'époque, on en compte un dans pratiquement tous les villages. Son travail consistait à construire des
charrettes
pour le déplacement de tous les jours, mais aussi des chars, des tombereaux et des brouettes pour le travail des champs. Il s'occupait donc
également des réparations sur ces différents engins. Le carrossier, lui, se consacre à la construction de carrosse, de calèches, de voitures hippomobiles.
Le premier charron de la famille Heuliez a exercé au début du 19e siècle. Au début du 20e siècle, le petit-fils de ce dernier, Adolphe Heuliez,
développe l'atelier de Cerizay, dans le Poitou. la Seconde Guerre va cependant mettre un terme provisoire à l'essor de l'entreprise.

En 1922, Louis Heuliez, fils d'Adolphe, se spécialise dans la fabrication de charrettes anglaises et met au point un procédé de caoutchoutage
de roue qui connaît un vif succès. La charrette anglaise d'ailleurs est encore, de nos jours, le symbole de la maison. C'est donc Louis qui donna sa spécialité
à l'atelier Heuliez. A cette époque, le moteur à explosion devient le moteur de référence et la motorisation vapeur n'est plus qu'un souvenir.
Heuliez suit cette évolution et en 1925, la maison carrosse son premier châssis motorisé Peugeot, un break type 177 B. Cette composition
est un utilitaire et non une automobile. Heuliez se distingue déjà des autres carrossiers qui s'occupent plus spécifiquement des automobiles.
Après les utilitaires, Heuliez passera en 1932 aux autobus, à ossatures en bois. Quatre ans plus tard, sous la marque Robustacier, Heuliez construira des
véhicules à ossatures métalliques. la charrette hippomobile se faisant de plus en plus rare, les carrosseries d'autobus et d'autocars deviennent une
spécialité d'Heuliez durant la période d'entre deux guerre.

Henri et Louis Heuliez
En 1947, Louis Heuliez disparaît. Ce sont ses fils, Henri et Pierre qui reprennent l'entreprise familiale. A cette époque, et comme les autres entreprises
du pays, Heuliez subit de plein fouet les contrecoups de la guerre et les ateliers ne compte plus qu'une trentaine d'employés. Cependant, l'entreprise reste
active. Henri Heuliez a bien l'intention de développer un grand pôle industriel, Pierre dirigera le bureau du design.

1949
Pour le premier Salon de Paris d'après-guerre, Heuliez choisit de présenter un autocar de Grand Tourisme Citroën P45.

Au cours de cette période, Heuliez va diversifier sa production, se lançant également, en 1953 dans la fabrication de mobilier scolaire Robustacier.
Cette branche Heuliez deviendra le premier fabricant français de mobilier scolaire et deviendra la Société Behin Robustacier Mobilier (BRM) en 1971.
Côté carrosserie, les anciens ateliers situés dans le bourg de Cerizay sont abandonnés pour une nouvelle usine située en dehors de la commune, route du Pin. Ces
ateliers ne cesseront de prendre de l'ampleur. La firme devient de fait la Société Louis Heuliez
Essor
Heuliez va donc se concentrer essentiellement sur la production d'autocars et de grands véhicules publicitaires. Ces
derniers vont sillonner les routes de France, particulièrement en juillet au sein de la Caravane du Tour de France.

Une coopération avec Citroën permettra de développer des fourgons et Autocars Citroën, permettant à l'entreprise de s'agrandir et
d'ouvrir des lignes de montages en petites et moyennes séries dès 1953, année ou la fabrication à l'unité est abandonnée.

Diversité
Avec la création du site de Bressuire, Heuliez débute la production des encadrements de portes pour la Peugeot 404. L'achat de presses
d'emboutissage permet cette fabrication mais aussi de produire des sièges pour la 2 CV Citroën. En 1968, Heuliez fabriquera aussi des
soubassements pour les Simca 1300 et 1500, puis le hayon arrière des Simca 1100. L'entreprise prend de l'ampleur. Après la création de Robustacier, de
la société Henri Heuliez, la SA Louis Heuliez est structurée en quatre divisions qui deviendront, en 1972, la Division Etudes Automobiles (DEA), la Division
Heuliez Automobiles, la Division Car et bus et la Division Véhicules Série.
Automobiles

C'est dans les années soixante qu'Heuliez aborda l'automobile. Rappelons
qu'avant 1968, Heuliez avait déjà réalisé trois prototypes automobiles, trois pré-projets sans suite sur base Citroën, un cabriolet DS
en 1962 (qui resta propriété d'Henri Heuliez), une Ami 6 Break qui sera présentée en 1963 également mais qui ne sera pas retenue, Citroën
préférant produire sa propre version, et enfin une Dyane tout chemin. Là encore, Citroën préféra l'étude de la société SEAB qui sera commercialisée
sous le nom de Méhari.

Heuliez avait également présenté, lors du Salon de 1968,
un cabriolet Simca 1100 et un Coupé Simca 1501.

En 1968, Heuliez présente sa première création personnelle, la Murène, berlinette sur châssis
Porsche 914. Cette voiture est dessinée par Jacques Cooper. Présentée au Salon de Paris de 1970, la Murène est moderne, originale et surpasse
sans mal la version de série au dessin maladroit. Pourtant, elle restera au stade de prototype.
La Murène sera abandonnée par Heuliez qui, sans le soutien financier de Porsche, préféra renoncer à la commercialisation du modèle.

Jacques Cooper
Auteur du dessin de la Murène, Jacques Cooper est né en 1931 et, après une formation à l'école Boulle, travailla dès 1953 à l'agence parisienne de Raymond Loewy,
la Compagnie Américaine d'Esthétique Industrielle. Embauché en 1957 par Renault, il travaillera sur les projets de la R 4L et de la R8, de l'estafette et divers
utilitaires. C'est en 1960 qu'il quitte la régie pour rejoindre la division Electro-ménager de la General Motors, pour créer les lignes des réfrigérateurs
et cuisinières Arthur Martin. En 1966, il travaille pour Brissonneau et Lotz, travaillant entre autre avec Paul Bracq, styliste français réputé qui oeuvra pour
Mercedes et Peugeot. Il travailla alors sur un projet de coupé sur base Porsche 914. La firme, sur le point d'être reprise par Renault, Cooper contacta
Heuliez qui s'intéressa au projet. La voiture sera construite à Cerizay sous le nom de Murène.
Cooper partira ensuite travailler pour Alsthom, ou il signa la
carrosserie et les aménagements du premier TGV mis en service en 1987.
Années 70
Yves Dubernard et Gérard Quéveau
Né en 1945, Yves Dubernard entra chez Peugeot en 1965, puis passa chez Simca en 1969. C'est lui qui mettra sur pied le studio Heuliez. Il en assurera la
direction jusqu'en 1984 avant de retourner chez Peugeot ou il dirigera la direction du design extérieur au Style avancé PSA.
En 1971, Heuliez se dote d'un important bureau de style dirigé par Yves Dubernard. ce dernier réalisera le Taxi H4, un véhicule monocorps compact et moderne
qui marque une étape importante dans ce type de véhicule car on peut estimer qu'il devance et préfigure les monocorps comme l'Espace. En 1974, Gérard Quéveau
succède à son beau-père à la présidence de la SA Louis Heuliez. La division automobile et les activités continuent de s'étendre, avec notamment la création
d'un centre de recherche. En 1993, Heuliez Automobiles se divisera en deux sociétés, d'une part Euro-Automobiles Heuliez qui assure la fabrication de
véhicules complets pour le Groupe PSA Peugeot Citroën, et d'autre part Eurostamp Heuliez pour la partie emboutissage.

Gérard Quéveau


Production en série
Dans ces mêmes années 70, la Division Car et Bus s'installera dans les Deux-Sèvres, à Rorthais. C'est de cette usine que sortiront les cars de CRS.
Le département automobile, lui, trouve sa véritable dimension avec la collaboration des constructeurs français. Ainsi, Heuliez va produire en
grande série des versions complémentaires de leurs gammes, comme le break Citroën BX dès 1983. La collaboration est rentable et de nombreux
modèles vont se succéder au fil des années. Aujourd'hui, Heuliez assure la production de certains utilitaires mais aussi des modules de toit
escamotables de la Peugeot 206 CC.
Quelques créations Heuliez, échecs et réussites

1970 - La M35 construite à peu d'exemplaires sera commercialisée comme véhicule laboratoire par Citroën. La plupart seront récupérée par la marque et détruite.

1971 - Heuliez propose deux versions de la SM, l'Espace et la 4 portes. Aucune ne verra le jour.

1971 - Heuliez produira les VF, l'utilitaire sur base Simca 1100.

1973 - Heuliez propose la 104 Safari à Peugeot. Le projet n'aura pas de suite.

1976 - Un autre projet pour Renault qui ne verra pas le jour, une R30 Coupé.

1978 - Pour Peugeot, Heuliez réalise la 604 HLZ Limousine, présentée au Salon de Paris de 1978.

1978 et 1979 - Heuliez prépare les carrosseries des R5 Turbo qui iront ensuite chez Alpine pour recevoir la motorisation.
C'est également Heuliez qui s'occupera des R5 Le Car.

Dans les années 80, des partenariats avec des constructeurs automobiles permet à Heuliez de devenir monter d'automobiles. A ses véhicules
de référence que sont les ambulances, les fourgons et les bus, le carrossier ajoute alors des petites séries et des modèles dérivés à son catalogue
ou à celui des constructeurs. Ainsi, il assemblera des limousines 604 et R25; puis des Fuego, des Citroën Visa Chrono, Mille Pistes, des BX 4 TC et
développera les 205 Turbo 16 et les R 5 Turbo.
R5 Turbo "Tour de Corse" 1983 Rallye de la Baule Alain Serpagi/Yves Legal
Eligor
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1981 - Une R4 découvrable, jamais commercialisée.

1982 - Autre projet non commercialisé, la Renault Fuego Cabriolet.

1983 - Heuliez s'occupe de la production des BX Break, mais aussi des BX 4x4.

1992 - Production de la Citroën XM.

1994 - La Safrane Long Cours restera une étude.

1998 - Peugeot 206 CC, produite chez Heuliez.
De nos jours
A côté des modèles de série, Heuliez présentera plusieurs concept-cars, qui seront exposés dans différents salons européens.
Aux côtés des réalisations hors normes produites pour les constructeurs, ces créations permettent à Heuliez d'affirmer ses
talents de carrossier à façon. En 1992, une antenne entièrement vouée au design sera ouverte en
Italie, la Heuliez Torino.
C'est Marc Deschamps qui dirigera cette antenne, un ancien de chez Bertone qui avait succéder à Marcello Gandini.
Rappelons que dès 1992, Heuliez Torino présenta la Raffica, puis travailla sur le projet d'une Lamborghini, la Pregunta de 1998.
La collaboration avec l'étranger se confirmera en 2004 lorsque Heuliez produira, en France, l'Opel Tigra Twin Top.



Heuliez travaille également pour de nombreux constructeurs, devenant fournisseur de divers accessoires, comme la banquette arrière des
Range Rover et celles de la Renault Modus, les assisses de sièges avant pour Ford ou des sous-ensemble de carrosserie pour la Citroën C6.
Depuis le début des années 2000, la firme fait face à de gros problèmes financiers. En 2010, elle cherche toujours un repreneur pour ne pas fermer
ses portes...
