CES HOMMES QUI ONT FAIT L'AUTOMOBILE     

Dernière mise à jour : 18/05/2010

    Flaminio Bertoni - 1903/1964    

Une carrière automobile exclusivement pour Citroën

Un génie, deux passions : Automobile et Sculpture
Né le 10 janvier 1903 en Italie, à Masnago, une petite ville de la région de Como (absorbée en 1927 par la ville de Varèse), Flaminio Bertoni obtient son diplôme professionnel en 1913, à l'école technique Francesco Daverio. A la mort de son père, il stoppe ses études et entre comme apprenti menuisier au sein de la Carrosserie Macchi. Passé à l'atelier de ferblanterie, il touche à ce qui va devenir sa passion, l'automobile. Dans le même temps, il découvre la sculpture et s'inscrit au cours de Giuseppe Talamoni, rencontre Lodovico Pogliani et Enrico Butti avec lesquels il participe à la création du monument aux Morts de la guerre de la ville de Varese. En 1923, une délégation française, composée de techniciens de l'automobile en visite à la Carrosserie Macchi; découvre les dessins de Bertoni et l'invite à Paris.

Son séjour à Paris achevé, Bertoni revient à la Macchi en 1924 ou il prend le poste de chef dessinateur. Il ouvre alors son propre atelier d'artiste à Varese, au 3 rue Indipendenza. En conflit avec sa direction, il démissionne en 1929 et ouvre un atelier de dessins et de projets. Il travaille alors pour ses premiers clients, la Carrosserie Varesina et la Carrosserie Baroffio. C'est à cette époque qu'il rencontre sa future femme, Giovanna Barcella. En conflit avec sa mère qui le voudrait marié à une cousine Germaine, il décide de fermer ses ateliers et de rejoindre Giovanna à Paris. C'est dans la capitale française que naîtra son fils Léonardo, le 25 avril 1932. Le 27 mars, il est engagé par André Citroën. De suite, il se met au travail et réalise, en une nuit, la sculpture de celle qui deviendra la traction. C'est le premier au monde à réaliser une automobile en volume et non en dessin. Cette nouvelle méthode de travail fera école et les créations futures passeront désormais par la construction de prototypes, à échelles diverses. Un principe qu'adopteront vite les autres constructeurs.

Tout en poursuivant sa carrière chez Citroën, Bertoni s'adonnera à la sculpture, remportant des prix dans diverses expositions. Ses dessins, exposés, donneront quelques idées. L'un de ses derniers sera repris par la Carrozzeria Baroffio, en Italie, pour la réalisation du premier autobus à visibilité totale, la cabine avancée sur le moteur. Sa passion artistique l'occupant beaucoup, il est de plus en plus éloigné de sa famille, ce qui pousse sa femme à retourner vivre en Italie avec son fils. Seul, il continue de fréquenter assidûment les expositions, Salon des Tuileries, Salon d’ Automne, Salon des Artistes Indépendants, Salon des Artistes Françaises.. Il n'oublie pas pour autant sa passion pour l'automobile et, il travaille sur un projet de véhicule à trois roues dénommé V3R, pour l'entreprise ERSA Courbevoie, un projet qui restera à l'état de prototype mais qui renaîtra sous la forme d'une automobile Mathis en 1954, la 333. Au sein de la marque au chevrons, il travaille sous la direction de Pierre Boulanger à l'élaboration d'un nouveau projet, la TPV, autrement dit la future 2 CV.

Seconde Guerre mondiale : Bertoni entre deux camps

En 1937, son fils Leonardo vient le rejoindre à Paris, sans sa mère mais avec sa grand-mère paternelle. Deux ans plus tard, il réalise sa première carrosserie d'utilitaire, celle d'un fourgon à plate-forme unique qui sera baptisé "TUB". La menace de guerre va compromettre sa carrière. En effet, sa nationalité italienne, à laquelle il ne veut pas renoncer, le met dans une situation délicate, l'Italie se trouvant dans le camp ennemi. Il fait donc rentrer son fils et sa grand-mère au pays et reste seul à Paris. Au moment ou la guerre éclate, il est arrêté, le 11 juin 1940, interné dans l'attente de son envoi dans les colonies françaises. L'arrivée des allemands à Paris empêchent son transfert et provoque sa libération. Pendant l'occupation, il poursuivra ses études au sein de Citroën, c'est à cette période qu'il est victime d'un sérieux accident de moto lors d'un service commandé par la marque. Il restera un an sur un lit d'hôpital et subira pas moins de six interventions chirurgicales pour sauver sa jambe gauche (qui sera réduite de 3 centimètres). Au cours de cette période d'occupation, il continue de dessiner des portraits en buste, il travaille sur des brevets, étudie l'allemand, prépare son diplôme d'architecte. Il travaille sur plusieurs projets, dont celui d'une torpille magnétique qu'il proposera au Ministère de la Marine italienne. Fin 1941, il reprend son poste chez Citroën. En 1942, lors d'un voyage en Italie, pour voir son fils, il rencontre Lucienne Marodon, première danseuse à la Scala de Milan et à l'Opéra de Paris. En 1944, le 25 août, les troupes françaises libèrent Paris, et Bertoni est à nouveau arrêté,le 31 août. Accusé de collaboration avec l'Allemagne, il est incarcéré durant trois jours avant d'être libéré, le dossier d'accusation n'étant pas jugé assez consistant.

TUB, 2 CV et DS

Après le TUB, réaliser en 1939, Bertoni reprend les études de la TPV, projet arrêté mais dissimulé pour ne pas tomber entre les mains des occupants allemands. Avant la guerre, les premières 2 CV furent détruites. On en retrouvera cependant trois au centre d'essais, puis une en pièces détachées. Les plans sont sauvés et l'étude peut reprendre en 1945. Dans le même temps, Citroën commande une autre étude, celle de la V.D.G., la remplaçante de la Traction. La 2 CV sera présentée le 7 octobre 1948 au Salon de Paris, entre-temps, Bertoni s'est séparé de Giovanna et a épousé Lucienne Marodon qui lui donner un second fils, Sergio, né le 27 juin 1949. Deux jours plus tard, Flaminio obtient son diplôme d'architecte. Styliste automobile, sculpteur, notre génie devient architecte et débute plusieurs projet immobilier à Paris. Malgré un agenda bien rempli, dans le domaine artistique, Flaminio trouve le temps de réaliser son nouveau chef-d'oeuvre. La Citroën DS sera présentée au Salon de l'Automobile de Paris de 1955. Cette réalisation place Bertoni dans l'Olympe des stylistes. La DS, exposée à la Triennale de Milan e 1957 recevra le Premier Prix comme oeuvre d'art industrielle. Bertoni a réussit à marier Art et Automobile.

La DS, "Best World Design Object of the 20th Century", à Londres en 1999.

AMI 6

En 1961, Bertoni signe une nouvelle étude pour Citroën, l'Ami 6. Là encore, son style surprend. La ligne de la carrosserie est innovante, avec la lunette arrière inversée, en forme de "Z", qui permet l'accès facile à la malle arrière sans enlever de confort aux passagers. Cette curiosité ne se retrouve pas sur les premiers dessins de Flaminio, le styliste étant parti d'un dessin de la DS pour concevoir celle qui devait, au catalogue, se situer entre ses deux dernières créations. Bertoni a encore signé une première mondiale, l'Ami 6 étant la première voiture au monde à phares rectangulaires. L'Ami 6 est aussi la dernière voiture qu'il dessinera pour Citroën.

Flaminio s'éteindra le 7 février 1964, après avoir effectué une dernière retouche à la face avant de celle qui restera, pour nous, sa plus belle création, la DS.