MEMOIRE DES CIRCUITS     

Dernière mise à jour : 12/05/2010

Brooklands

Pendant le premier quart du 20e siècle, chaque capitale de puissance occidentale se devait de posséder son autodrome, stade moderne ou s'affrontaient ces nouveaux sportifs qu'on appelait déjà des coureurs automobiles. Londres initia le mouvement avec le circuit de Brooklands.

L'anneau de Londres

Hugh Locke King

Brooklands est le premier circuit permanent à voir le jour, en 1907, avant celui d'Indianapolis en 1911, celui de Monza en 1922 et celui de Montlhéry en 1923. Comme pour la majorité des circuits de cette époque, l'initiative en revient à un seul individu, passionné de sport automobile, fortuné, Hugh Locke King.
Mécène dont la passion pour le sport automobile l'oblige à faire de fréquents séjours sur le continent, puisque les courses automobiles sont interdites en Grande-Bretagne, Hugh Locke King rêve d'organiser des compétitions sur le sol anglais. Son idée est que si les chevaux courent sur un hippodrome, pourquoi ne pas faire la même chose pour les voitures en créant un autodrome. Rappelons que depuis 1861, la Grande-Bretagne a une loi, le Red Flag Act, qui impose à l'automobile une règle qui empêche son développement. Selon cet acte, une automobile ne doit pas dépasser les 18 km/h et, lors de ses déplacements, doit être précédée d'un homme à pied agitant un drapeau rouge pour signaler l'arrivée de la voiture. Cet acte, qui pénalisa fortement l'automobile au détriment du chemin de fer, ne fut aboli qu'en 1896. Il faut dire que ce lobby ferroviaire anglais fait tout pour barrer la route des voitures. Il est notamment interdit d'organiser des courses en ville. Autre obstacle, la vitesse fut limitée à 35 km/h. Avec ses règles, il est fort difficile d'organiser des courses sur routes. L'idée de construire un autodrome permettrait de compenser ce manque. Hugh Fortesque Locke King possède un immense terrain, à côté de Londres, du côté de Weybridge. C'est là, à Brooklands, qu'il décide, avec ses amis, d'implanter le premier circuit permanent du monde.

Le tracé

Le dessin du circuit est établi par le colonel Holden, un circuit en forme de poire. King engage quelques 2.000 terrassiers irlandais, venus avec femmes et enfants, pour réaliser l'ouvrage. Les travaux débutent en 1906 et se terminent un an plus tard. Les difficultés ont été immenses et, comme plus tard pour l'autodrome de Montlhéry, la plus grande partie du ciment a été mélangée à la pelle et les finitions effectuées à la truelle. A cette époque, les engins sophistiqués de terrassement sont pratiquement inconnus, mais on compte quand même sur le chantier une dizaine de machines à vapeur.
Il est dit qu'il a fallu fabriquer 200.000 tonnes de béton pour construire l'autodrome de Brooklands. Le coût de l'opération dépassa les 150.000 £ sterling. Sur le chantier, outre les 2.000 ouvriers, on comptait 80 camions, 6 locomotives et une dizaine de kilomètres de rails. Les chevaux étaient également nombreux.

Premières courses

La première course sur le circuit a lieu en 1907. Les débuts sont difficiles, et le succès n'est pas au rendez-vous, il y a peu de monde pour admirer les machines. Pourtant, une série d'épreuves à handicap y seront organisées par la suite, et ce jusqu'à la Première Guerre mondiale. Le vrai démarrage de l'autodrome aura lieu au début des années 20, grâce au fantastique engouement populaire pour cette industrie et pour ce sport. De 1920 à 1930, Brooklands devient l'un des autodromes les plus connus au monde. Il y a deux raisons majeures à cette renommée. D'une part, c'est l'ère où les populaires cyclecars entrent en scène et attirent l'attention d'un public plus large. D'autre part, une pluie de records sont tentés, et souvent réussis, sur l'anneau de vitesse.

Même ma Blitzen Benz vient à Brooklands, ici en 1909

Lee Guinness

De nombreux records tombent à Brooklands, nationaux ou internationaux. En mai 1922, le dernier record du monde de vitesse enregistré sur un circuit se fera à Brooklands. C'est Lee Guinness, avec sa Sunbeam V12 qui établit ce record, avec 133,758 miles à l'heure. Après cet exploit, tous les records de vitesse absolue auront lieu sur des plages ou sur des lacs salés.

Courses renommées, pilotes talentueux

Brooklands va connaître son apogée durant l'entre-deux guerres. Courses d'endurance, de vitesse, records, toutes les épreuves sont organisées. Un petit circuit routier sera même construit pour accueillir plus de diversité. Les motos seront également accueillies pour diverses épreuves, au même titre que les avions. Parmi les habitués de l'époque, un certain Alfred Moss, dentiste et pilote à ses heures, père d'un célèbre Stirling Moss. Une anecdote raconte que Stirling ira jusqu'à faire croire à son père qu'Indianapolis est la ville ou à lieu le plus grand congrès de dentistes, pour qu'il lui offre le voyage.
Les meilleurs pilotes se sont retrouvés sur le circuit de Brooklands, à se confronter sur les 4.425 m de son "ruban". En 1921, 1925 et 1926, le meilleur pilote britannique des années 20, Henry Segrave, remporte la course des 200 Miles de Brooklands, une grande classique du circuit. Une autre épreuve de longue durée organisée à Brooklands est les 500 Miles, mis sur pied par le British Driver's Club. En fait, les épreuves disputées à Brooklands, grandes et petites, sont nombreuses. Mentionnons le premier Grand Prix de Grande-Bretagne, qui a lieu en 1926. Les vainqueurs sont Louis Wagner et Robert Sénéchal qui partagent une Delage.

Sur ce cliché de 1926, pris lors du Grand Prix de Grande-Bretagne de 1926, on distingue une Talbot 1500 au premier plan.

Fin du circuit

Le circuit de Brooklands est assez large, plus de 30 m, et les voies de circulation intérieures sont pratiques. Aussi, on se sert de ces facilités pour organiser des courses, avec des chicanes et des combinaisons multiples. Une course de deux fois 12 heures, pour ne pas perturber le voisinage avec le bruit en courant pendant 24 heures d'affilée, est également organisée pendant un temps. En 1914, Brooklands sera réquisitionné par l'aviation pendant le temps du conflit. Ce sera également le cas pendant la Seconde Guerre. Cependant, cette guerre sera fatale au circuit. Le circuit sera la cible des bombardements allemands. Pour tromper l'ennemi et devenir moins visible du ciel, les anglais démoliront en partie les "bankings" (virage relevés). A la fin du conflit, en 1945, le circuit est en piteux état et comme de plus il se trouve en zone inondable, personne n'est vraiment soucieux de le sauver. de plus, il existe désormais Silvertsone. Le circuit ne se relèvera donc pas de cette période et la firme Vickers, nouveau propriétaire des lieux, y installera des ateliers. Quelques parties sont restées intactes, mais abandonnées à la végétation.
Le circuit de Silverstone, situé sur une ancienne base militaire de la RAF créée en 1943 pour les besoins de la guerre. Après les hostilités, le Royal Automobile Club a obtenu des autorités militaire l'autorisation de s'en servir pour des courses automobiles. La première course aura lieu en 1948, ce sera le Grand Prix de Grande-Bretagne de Forumle 1.

Sauvetage

Au début des années 2000, Mercedes décide de construire un projet pharaonique, construire un musée avec restaurant, un hôtel, et un show-room géant. La marque allemande a reconstruit partiellement le circuit et y a installé une école de pilotage.

Brooklands, vu du ciel aujourd'hui. On distingue les parties manquantes du circuit et les parties laissées à l'abandon.