LES COURSES D'ANTAN
Dernière mise à jour : 05/05/2010
La Course au ralenti de Montmartre
La première de Louis Renault.
En décembre 1898, le tout jeune Louis Renault remonte
la rue Lepic pour démontrer la fiabilité de sa tout première automobile.
Quelques temps plus tard, cette ascension devenue mythique va devenir une course
originale, où le côté bon enfant rime avec débrouillardise.
Dans les rues de Paris, accoudés au bar, ou en
famille autour du repas du soir, les français ne parlent plus que d'elle.
L'automobile naissante surprend, étonne, et fait ses premiers émules. Dans les
ateliers, quelques hommes s'essaient à la mécanique et tente de construire ce
nouvel engin à l'avenir prometteur. Personne n'est indifférent et les témoins
des premiers tours de roues de l'automobile s'émerveillent de voir ces fous du
volant surgir au coin des rues. D'autres ne cachent pas leur angoisse et leur
colère devant ces mécaniques du diable qui font du bruit, de la fumée et
surtout, roulent vite. Il faut dire qu'à cette époque, rouler à 50 km/h est
suffisant pour affoler les passants. Ajoutons la colère des cochers qui doivent
contenir l'affolement des chevaux et nous avons une belle pagaille. Pour ou
contre, l'automobile s'en moque. Au fond de son atelier, loin de ce tumulte,
Louis Renault bricole.
En 1894, la première revue spécialisée voit le jour :
"La Locomotion automobile".
Les constructeurs et équipementiers vont rivaliser d'ingéniosité pour apporter leur pierre à cette
nouvelle industrie. Depuis 1894 et le Paris-Rouen, les courses automobiles de
vitesses ou d'endurance se multiplient et permettent à de jeunes marques de se
faire connaître et démontrer la robustesse et la puissance de leurs
réalisations. C'est ainsi que De Dion-Bouton et Panhard se sont fait une belle
renommée. Michelin également avec sa fameuse chambre à air. Des premières places
dans ces premières courses permettent souvent d'enregistrer de nombreuses commandes
fermes. Personne ne s'y trompe et les lignes de départ sont souvent embouteillées.
C'est de cette manière que Louis Renault fera connaître ses modèles, en
remportant notamment sa catégorie dans le Paris-Bordeaux et le Paris-Toulouse de
1899. Après ces courses, plus de 300 bons de commande atterriront sur son
bureau.
Mais revenons en 1898
Dans son petit atelier discret de Boulogne,
Louis Renault, 21 ans et employé d'une fabrique de chaudière, bricole une petite automobile sur caisse Tilbury.
Nous sommes en 1898 et De Dion-Bouton produit des tricycles dotés de moteur
monocylindre de 198 cm3. Louis Renault va démonter le sien, récupérer le moteur
et le greffer
sur son engin. Pour faire fonctionner ce véhicule, Louis invente un mécanisme de
transmission encore jamais vu : une boîte à 3 vitesses à prise directe. Ce
système à l'avantage de limiter le perte de puissance. Il déposera son brevet le
9 février 1899 et bénéficiera, avec la vente de licences, de revenus qui lui
permettront de poursuivre ces travaux.
Le rendez-vous du 24 décembre 1898
Une fois son automobile terminée, Louis
Renault va, sans le vouloir et par un concours de circonstance, prouver la
fiabilité de sa voiture et de ce fait, faire connaître son invention, la "prise
directe". Le soir de Noël, Louis sort sa voiturette et va fêter, avec des
amis, la nativité dans un cabaret de la rue
du Helder. De nombreux convives, intrigués par le Tilbury de
Louis et curieux s'en savoir plus, se pressent autour du petit véhicule. Un des
clients lui demande de la faire rouler et, jouant le jeu, Louis pari que sa
voiture peut remonter la rue Lepic, longue de 700 mètres et possédant une pente
de 13 %. Cette rue est à l'époque le cauchemar des automobilistes. Louis entame
alors sa montée vers Montmartre et arrive au sommet sans poser pied à terre et
sans avoir recours à la moindre poussette. Celle qui deviendra le Type A vient
de prouver sa fiabilité et Louis, devant une foule incrédule rendue à
l'évidence, gagne son pari. La "prise directe" est un succès et ce soir-là,
Louis empoche 12 premières commandes confirmées par versement d'arrhes. Cet
évènement, presque anecdotique, lancera Louis dans l'aventure industrielle,
entraînant par la même occasion ses deux frères, Marcel et Fernand. La "prise
directe"
va catapulter l'automobile dans une nouvelle ère. Première boîte de vitesses, elle démode d'un coup chaînes et
courroies de transmission utilisées jusque là. Tous les constructeurs de
l'époque vont l'adopter, faisant du coup la fortune de son créateur.
Louis Renault et son Type A
La course au ralenti
En 1922, Louis Renault est à la tête d'une grosse entreprise.
Ses voitures sont réputées, vendues dans le monde entier. Il est loin de se douter que son exploit
de 1898 va refaire la une de l'actualité sportive. Pierre Labric, journaliste, et en association avec
l'Automobile-Club d'Île-de-France et le journal Le Petit Parisien, à l'idée de lancer une course intitulée "La
course au ralenti de Montmartre". L'idée est toute simple puisqu'il s'agit de
refaire le trajet que Louis Renault effectua en 1898. Seul impératif, le faire
le plus lentement possible, sous le contrôle de commissaires de course et les
applaudissements d'une foule pittoresque. L'engouement est rapide et de nombreux
amateurs se bousculent pour participer à cette épreuve. Motocyclistes comme
automobilistes, tous vont tenter l'exploit de gravir la côte en un minimum de
temps, sans mettre un pied à terre pour les premiers, sans caler pour les
seconds. Durant les premières années, les pilotes de motocycles mettront une
quinzaine de minutes pour gravir la pente alors que les conducteurs
d'automobiles prendront plus de plaisir en la gravissant en une bonne
demi-heure. L'arrivée, jugée place du Tertre, est toujours captivante et
toujours une fête. Malgré une interruption pendant la Seconde Guerre, l'épreuve
sera à nouveau organisée dès 1947, avec toujours un public endimanché qui
réserve le meilleur accueil aux pilotes d'un jour et à leurs pittoresques
machines. Pendant des décennies, cette manifestation réunira de nombreux
participants et spectateurs unis dans un enthousiasme communicatif. Certains
sont arrivés à gravir la rue Lepic en 2 heures, soit une vitesse de 0,3 km/h. En
1978, aux côtés des ancêtres, la Renault Alpine victorieuse au Mans fut au
rendez-vous, à la grande joie des spectateurs. En 1998, il y avait toujours
autant de monde pour fêter, à cette occasion, le centenaire de Renault.
Trois images de cette épreuve particulière.
En 1947 d'abord, où l'on voit les spectateurs, en tenue du dimanche, venir
soutenir les pilotes inscrits à l'épreuve. Pour commenter l'évènement, les
quotidiens parisiens sont présents. Pour l'occasion, les costumes d'époque sont
de sortie. En 1978, l'Alpine Renault vient victorieuse au Mans vient fêter le
centenaire de Renault, accompagnant pour l'occasion une Type A d'époque.
Une autre course pas comme les autres à Paris
Dans l'histoire de la compétition automobile,
on trouve quelques exemples de courses pas tout à fait comme les autres. Ce qui
nous fait plonger dans le passé et dans des situations qu'on a du mal à imaginer
aujourd'hui. Citons l'initiative de deux amis, Mr Lefebvre et Mr Faroux, qui
eurent l'idée d'organiser un Grand Prix dans Paris. Puisqu'il est possible d'en
organiser à Monaco, pourquoi pas dans la capitale. L'itinéraire choisi pour
cette épreuve particulière laisse assez songeur. Les voitures devaient prendre
la rue Royale, atteindre la Concorde, prendre le boulevard St-Germain, passer
gare d'Austerlitz, rejoindre la Bastille et remonter les grands boulevards. Ce
circuit est à accomplir trois fois. Les pilotes sont soigneusement triés sur le
volet et doivent tous être des chauffeurs de taxi. Ils doivent être
impérativement accompagné par un passager. Au terme de l'épreuve, c'est une
Chenard & Walcker qui franchit la première la ligne d'arrivée et remporte
le trophée. Si tout le monde est satisfait, organisateurs, participants et
public, ce n'est pas le cas du préfet de police qui n'apprécia pas du tout cette
compétition dans Paris. L'expérience ne sera pas renouvelée.