MEMOIRE DES CIRCUITS     

Dernière mise à jour : 12/05/2010

Montlhéry

Création

Après la création de Brooklands (Grande-Bretagne) en 1906, d'Indianapolis (USA) en 1908, de Monza (Italie) en 1910, de l'Avus (Allemagne) en 1921 et de Miramas (France) en 1923, c'est au tour de la région parisienne de vouloir son autodrome.
Après la Première Guerre mondiale, la France est encore en reconstruction et le pays est toujours confronté à de grands problèmes financiers et sociaux. L'industrie automobile française, de son côté, soutenue par les pilotes et organisateurs de compétitions automobiles, réclame avec insistance un circuit digne de ce nom, un ovale doté de virages relevés qui permettent des vitesses élevées et, surtout, de tester les vitesses maximales.

1923

Alexandre Lamblin (1885-1933)

Alexandre Lamblin, industriel et propriétaire d'une usine de radiateurs d'automobiles et d'avions, propriétaire également du journal sportif "l'Aéro-sport", est à l'origine du projet. C'est lui qui a l'idée de doter la Capitale de son Circuit de vitesse. Il est vrai qu'à cette époque, la région parisienne est l'un des principaux centres de l'industrie automobile française. Après avoir monté quelques projets, en vue d'acquérir des terrains pour bâtir son circuit, Alexandre Lamblin  délaisse les centaines d'hectares de la commune de Nozay pour arrêter son choix sur des terrains situés sur le plateau de Saint-Eutrope, à Linas. Alexandre achète là les 5.000 ha dont il a besoin. Sur deux études qui lui sont proposées et qui furent menées de front, c'est la seconde, un anneau de 2,5 km de longueur éventuellement complété par un circuit routier extérieur, qui est retenue. Elle s'avère également la moins coûteuse. L'auteur de ce second projet est l'ingénieur Raymond Jamin.

1924

Raymond Jamin a dessiné un ovale avec deux courtes lignes droites de 180 mètres. Dans les virages, elle possède un profil concave en forme de parabole cubique à axe vertical et les raccordements sont tracés suivant une spirale logarithmique, ce qui constitue  l'une des particularités de cet ouvrage. L'anneau est calculée de manière a ce que des voitures de 1000 kg puissent atteindre, en haut des virages, des vitesses de 220 km/h environ. Son développement est de 2548,24 mètres. A l'origine, ce tracé devait faire 3,3 km.

Montlhéry en 1924

Inauguration

Deux mille ouvriers, comprenant des maçons, des ferrailleurs, des charpentiers, des camionneurs etc.. vont travailler pendant six mois à la construction de ce grand ouvrage. 1.000 tonnes d'acier et 8.000 m3 de béton seront utilisés. de nombreux éléments seront préfabriqués, en faisant de ce fait une construction d'avant-garde pour l'époque. Des passages de liaison ou "bretelles sont construites, et permettent d'utiliser des circuits de développement inférieur, selon les besoins. Certains de ces circuits sont d'ailleurs homologués pour les compétitions. Une fois achevée, la piste du circuit fait 10 mètres de largeur et est bordée par des accotements de 2 m de large en moyenne.

Le 4 octobre 1924, l'Autodrome parisien ouvre ses portes. La première course est prévue pour les 11 et 12 octobre.

L'inauguration officielle a donc lieu le 12 octobre 1924. Dans les deux mois qui suivent cette cérémonie, plus de cent records vont être battus ou établis sur la piste ovale. Les spécialistes de la vitesse se pressent pour venir tester et faire rouler leurs engins expérimentaux. Même les britanniques sont là. Il faut dire qu'en Grande-Bretagne, le Circuit de Brooklands subit de plein fouet des restrictions de bruit imposées par les résidents voisins de cet autodrome. De ce fait, les pilotes et ingénieurs anglais doivent subir des contraintes, comme celles d'être silencieux et de ne pas utiliser la piste de nuit. Des restrictions incompatibles avec la vocation du circuit, mais bénéfiques au circuit français. La marque Rolland-Pilain ouvrira la danse des records en plaçant le record français des 24 heures à 104 km/h avec une 2 litres.

1925

En 1925, Alexandre Lamblin décide de faire évoluer l'autodrome et d'y ajouter un circuit routier. En juin 1925, le nouveau projet est réaliser. Désormais, le circuit développe 12,500 kilomètres, un parcours sinueux et vallonné qui va permettre d'organiser des courses sur route. C'est le 26 juillet que Montlhéry accueille le Grand Prix de l'ACF, le Grand Prix national français, supplantant ainsi Strasbourg, Lyon et Tours, qui accueillaient précédemment la course sur des circuits de fortune. L'épreuve attire une foule considérable et le président de la République en fonction à l'époque, Gaston Doumergue, s'est également déplacé pour l'occasion. Si pour les records les voitures tournent dans le sens des aiguilles d'une montre, pour les courses, c'est le principe inverse qui est adopté. Sur la ligne de départ de cette épreuve, on retrouve de grands pilotes comme Robert Benoist et Albert Divo, Louis Wagner et Paul Torchy, Henry Segrave, Antonio Ascari,  Gastone Brilli-Peri, ainsi que Giulio Masetti, Pierre de Vizcaya et Ernest Eldridge.

Mort d'un Champion, une légende disparaît

Ce qui devait être une fête n'en fut pas une. Montlhéry va connaître son premier drame avec la mort d'Antonio Ascari. La course fut un vrai duel entre les Alfa Romeo et les Delage. Au 23e tour, Ascari mène la course et doit remporter l'épreuve lorsque son style exubérant et surtout la pluie, lui font heurter les fascines du circuit (un assemblage de branchages qui sert à combler les fossés). Sa voiture se renverse et Antonio ne se relèvera pas. En signe de deuil, l'écurie Alfa Romeo se retira de l'épreuve. C'est la Delage 2LCV de Robert Benoist qui remporte l'épreuve. Louis Wagner, sur Delage 2LCV également se classe second.

Antonio Ascari en course sur son Alfa Romeo P2 et après l'accident, lors de son évacuation.

Les records

Le circuit étant éclairée à l'électricité, il peut être utilisé de jour comme de nuit. Ce qui permet d'accueillir des records d'endurance. Les plus rands recordman du monde vont s'y déplacer. Albert Divo, au volant d'une Delage, y établit le premier record de vitesse à près de 220 km/h. Gwenda Stewart, une anglaise qui pilotera pour de grandes marques comme Morgan, va battre ce record du circuit en plaçant la barre à 234 km/h, sur une Derby-Miller. Elle conserva ce record pendant de longues années. Parry Thomas et Ernest Eldridge viendront également s'élancer sur la piste. Les grandes marques comme Rolland-Pilain, Bignan, Chenard & Walcker viendront y faire des éclats. Renault et Citroën feront bien sur partie de ces marques. Le 3 juin 1925, la 40 HP de Renault viendra battre le record des 12 heures, puis celui des 24 heures, à 141 km/h. Mais les plus connus sont sans nul doute ceux des "Rosalie" Citroën, numérotées de 1 à 8, disputés entre 1931 et 1935 avec la complicité des lubrifiants Yacco. Parmi ceux-ci, on trouve les 300.000 km parcourus en 134 jours à 93 km/h de moyenne en 1933.

1926 - 1939

Revenons en 1926. L'autodrome est un beau circuit qui demande cependant un gros financement pour son entretien. Alexandre Lamblin a bien du mal à rentabiliser son investissement et la société d'exploitation du circuit est donc, par jugement, déclarée en faillite le 13 janvier 1926. C'est un syndic qui va désormais s'occuper de la gestion de Montlhéry. Grâce au concours de grandes firmes liées à l'automobile, un entretien sommaire va pouvoir être apporté au circuit, ce qui permettra également d'y organiser le Grand Prix de l'ACF de 1931, puis ceux de 1933 à 1937. La foule sera toujours au rendez-vous pour y découvrir les nouvelles sportives françaises et étrangères. Après les duels entre Alfa-Romeo et Delage, les Auto-Union et Mercedes viendront concurrencer les Bugatti.

En 1939, malgré la bonne volonté de tous, et après environ 22 millions de kilomètres parcourus sur sa piste, l'autodrome est en piteux état. Le revêtement en béton est si dégradé qu'il ne permet plus d'y faire rouler les monoplaces à haute vitesse. Les courses automobiles y sont de moins en moins nombreuses, voire abandonnées. Les frais de gestion sont devenus faramineux et impossibles à assumer par les exploitants de l'époque. Seule solution : Vendre.

Battre des records. Une des missions du circuit.
En 1938, le site est racheté par le Domaine National. Les 750 hectares sont ensuite mis en 1939 à la disposition du ministère de la Guerre. La partie ouest du circuit routier sera alors coupée. Durant la Seconde Guerre mondiale, l'autodrome va subir d'importants dégâts .

En décembre 1946, la paix revenue, la gestion du circuit est confiée à l'UTAC, l'Union Technique pour l'Automobile et le Cycle. Elle obtient du ministère de la guerre un bail de longue durée et, en contrepartie d'une redevance annuelle à l'administration des Domaines, la gérance civile des pistes et installations de l'autodrome à condition d'en effectuer la remise en état, l'entretien et l'acceptation de l'organisation de compétitions. Commence alors les travaux de rénovation auxquels vont s'ajouter des aménagements de taille. C'est durant cette période de reconstruction que la tour de contrôle sera édifiée, que la tribune de 1.000 places sera érigée et que seront créés la station de carburant, les pistes à surfaces spéciales et le laboratoire. Si cette phase de travaux dura en tout deux ans, le circuit ouvrira ses portes le 16 février 1947 pour une démonstration. A cette occasion, Maurice Trintignant et Raymond Sommer viendront parcourir le circuit.

Et depuis ???

A partir de 1947, Montlhéry va devenir un lieu d'expérimentation technique, une formidable piste d'essais pour les prototypes de grands constructeurs. Toutefois, les courses ne seront pas oubliées. Le circuit va accueillir deux Grands Prix de Formule 1, la Coupe du printemps en alternance avec la Coupe du Salon, au mois d'octobre, à l'occasion du Salon de l'Auto de Paris.

Les 12 Heures de Paris seront également organisés à Montlhéry. A partir de 1956, apparaissent les 1.000 km de Paris. Cette course sera réservée aux voitures de Sport et de Grand Tourisme qui emprunteront la moitié de l'anneau et le circuit routier. Mais le circuit ne permet plus aux véhicules les plus modernes d'atteindre leurs vitesses de pointe. La technologie progresse et le circuit lui, se dégrade. L'addition de ces deux phénomènes aura une tragique conséquence lors des Milles kilomètres de Paris 1964 où un accident causa la mort des pilotes Peter Lindner et Franco Patria ainsi qu'à trois commissaires de course. A partir de cette date, Montlhéry accueillera diverses épreuves mais c'est la Coupe de Paris qui sera le principal évènement annuel de l'autodrome jusque dans les années 90.
La Coupe de l'Âge d'or viendra compléter le calendrier en 1996. A cette date, l'Âge d'or est la troisième manifestation automobile française après les 24 Heures du Mans et le Grand Prix de France de Formule 1. Les deux dernières éditions de l'Âge d'or ont été organisé les 28 et 29 juin 2003 et 19 et 20 juin 2004. A quelle date l'édition 2005 ?
Si seulement un deuxième Alexandre Lamblin pouvait intervenir !
En avril 1997, puis le 9 mai 2001, l'autodrome a vu son homologation reconduite auprès de la commission nationale des circuits de vitesse, pour une durée de 4 ans (pour 2001, ce fut grâce à l'installation d'un grillage de protection pour les spectateurs, capable de résister à des chocs de 300 km/h). Sans cette homologation, les deux principales épreuves que sont les Coupes du Salon et le GP de l'Âge d'or n'aurait pas été organisées.
Aujourd'hui, déclaré impropre à l'usage civil, le circuit est mis à la disposition de l'UTAC pour des tests effectués par les grands constructeurs automobiles. Après la disparition du Circuit de Rouen-Les Essarts et celui de Reims, Montlhéry est le dernier patrimoine sportif et technique français. Souhaitons qu'il survive.
Le 19 et 20 juin 2004 a été organisé le 40e Grand Prix de l'Âge d'or. Ce fut la dernière édition, mais également une vraie réussite. En mai 2005, la fermeture du site au public sera donc un grand étonnement et une décision incompréhensible. La prochaine évaluation doit avoir lieu cette année et la vétusté des installations n'arrange pas les choses. La structure en béton de la piste est dans un état lamentable et sera bientôt inutilisable. Les travaux sont donc importants et coûteux et poussent le site vers une future démolition. Une catastrophe pour les amoureux du circuit et les nostalgiques de toute une époque. Nous sommes en 2005 et l'échéance approche. Grâce à la Mairie de Linas, une commission de sauvegarde de l'autodrome a été créée le 18 décembre 2002. Les pouvoirs publics, des élus locaux et des associations du monde automobile s'y retrouvent. Aujourd'hui, cette association est devenue l'ASALM et a pour vocation la sauvegarde du site de l'autodrome. Si vous aussi, vous voulez soutenir cette initiative, signez la pétition de soutien. Il suffit de cliquer sur le lien ci-dessous, d'imprimer la pétition et de la retourner à :
Mairie de Linas
Place Ernest Pillon
91310 LINAS

http://www.vehidex.com/linas/sauvegarde.htm

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